vendredi 11 juillet 2025

LE CHATEAU DE GRIGNAN, SUR LES PAS DE MADAME DE SÈVIGNÈ


 

« Sévigné, de qui les attraits
Servent aux grâces de modèle
Et qui naquîtes toute belle
A votre indifférence prés »

 J. de la Fontaine, Fable I, livre IV. 


Ces quelques vers de la Fontaine s'adressaient à la fille, ils auraient pu quelques années avant s'adresser à la mère.

 Après le délicieux diner d'hier au soir dans l'élégante maison du Clair de la Plume, la nuit a été douce au Pied de la Lettre malgré une chaleur tropicale. Le petit déjeuner dans cette belle maison d’hôtes qui fait aussi restaurant, épicerie fine et cave est délicieux et l'accueil des propriétaires charmants. Le Pied de la Lettre est au pied du chateau , au bas de la longue cote qui y mène, près de la Tour de l'horloge et d'une place charmante qu'occupent les terrasses de 2 restaurants et la statue de la marquise. L’histoire de Grignan se confond le plus souvent avec l’histoire de son château. Le bourg castral, mentionné dès 1105, se développe aux XIIIe et XIVe siècles, avec le rôle grandissant de la puissante famille des Adhémar de Monteil, dont la branche cadette (les Adhémar de Grignan), possédera définitivement la seigneurie dès 1239.
Le village, blotti au pied de son château, restera abrité à l’intérieur de ses murailles jusqu’à l’extrême fin du XVe siècle.


Depuis 1995, Bruno Durieux il est maire de la ville où il a créé le festival de la Correspondance, événement culturel et littéraire en hommage à la marquise. On la connu comme homme politique de la droite et du centre avant qu'il aille à la soupe comme ministre de Tonton (on dit ministre d'ouverture) où , en poste à la Santé, il a abaissé le numerus clausus avec les conséquences que nous subissons aujourd'hui. Cela dit ce village est superbe, dynamique et magnifiquement entretenu. La montée au chateau est très belle, le village est fleuri, les maisons sont coquettes et nous faisons le petit détour de la Collégiale où repose madame de Sévigné.

La collégiale Saint-Sauveur à Grignan a été construite entre 1535 et 1543 en contre bas du flanc sud-ouest du château. Cet édifice se rattache au gothique méridional tardif avec une nef unique et un chœur pentagonal. Les voûtes sur le doubleau et croisée d’ogives, les fenêtres a la remplage ainsi que les deux tours carrées appartiennent également à cette époque.
A l’intérieur, la tribune sur trompe, située sur le mur nord de la première travée, communiquait avec la basse-cour du château. C'est ce passage qu'empruntait la marquise pour se rendre aux offices.
Depuis cette tribune il était possible d’assister aux offices. Le retable du maître-autel et l’orgue datent pour leur part du 17ème siècle.


C’est en visite chez sa fille à Grignan que Marie de Rabutin-Chantal, la célèbre marquise de Sévigné (1626-1696) mourut : elle fut inhumée dans la chapelle du château, en contrebas du parc.

Cette femme cultivée et douée se partageait entre la Cour et la Drôme, voyage qui à l’époque était une épopée et que la marquise décrit dans sa correspondance à sa fille, ces fameuses Lettres dont l’apparente spontanéité dissimule une volonté "d’écrire bien", et dont les récits et descriptions constituent l’un de plus fabuleux mémoires sur la société du Grand Siècle. 

La marquise de Sévigné , celle qu’on appelait en son temps "la plus jolie fille de France"  et prend le nom de son époux, Henri de Sévigné, à leur mariage en 1644, alors qu’elle a 18 ans. Mais il meurt 7 ans plus tard : il s’est en effet battu en duel pour sa maîtresse contre un autre noble, le chevalier d’Albret. De son côté, courtisée par Nicolas Fouquet, elle sait lui résister. De Henri de Sévigné, Marie a deux enfants : une fille aînée, Françoise, née deux ans après son mariage et un fils, Charles. Lorsque sa fille se marie et part vivre en Provence avec son époux, le marquis de Grignan, en 1669, c’est un déchirement pour cette femme qui s’est absorbée dans son rôle de mère.

C’est pour garder un lien avec sa fille que Marie de Sévigné lui écrit régulièrement des lettres ; elle en soigne le style et sélectionne les meilleures anecdotes sur la vie de la cour. D’échanges personnels, ces lettres deviennent une œuvre littéraire, à la fois document sur le siècle de Louis XIV et monument artistique. S’y associent la perfection d’une langue et la précision d’un regard sur la comédie sociale de son temps.

 


Une énigme historique vient d’être résolue (2005) avec la découverte du crâne de la Marquise de Sévigné. Symbole de l’art épistolaire français, mère envahissante de la comtesse de Grignan, elle a été inhumée le 17 avril 1696 dans le caveau seigneurial de la collégiale de Grignan (Drôme). Le maire, Bruno Durieux, avait fait procéder à l’ouverture du caveau à l’occasion de travaux de restauration de la collégiale. Un crâne scié a été mis au jour, vendredi dernier, parmi d’autres restes. Des mesures précises ont été réalisées et le tombeau a été refermé. Cette découverte « confirme de manière indubitable » la thèse selon laquelle, en 1793, les révolutionnaires, à la recherche de plomb pour les armées, ouvrant les cercueils des aristocrates, avaient découvert les restes de Madame de Sévigné et en avaient fait scier le crâne, pour le faire expertiser par un spécialiste, a expliqué le maire. Selon cette thèse, la partie inférieure du crâne avait ensuite été remise, avec « le plus grand respect », dans le cercueil. « Un point de l’histoire des événements révolutionnaires à Grignan, qui a longtemps fait l’objet de relations divergentes, est aujourd’hui incontestablement et définitivement éclairci », estime la mairie. Selon une seconde thèse, le crâne de la marquise aurait été sauvé de la profanation des révolutionnaires par un prêtre réfractaire qui l’aurait mis à l’abri dans un couvent de Nancy. Or, des analyses ADN réalisées sur ce crâne ont établi que celui-ci n’était pas celui de l’écrivaine. Autre preuve est faite. En 1871, le dallage du chœur est remplacé par des carreaux de Viviers, en ciment comprimé

Le dallage du parvis est l'œuvre de l’artiste Philippe Decrauzat qui fait écho à la rosace visible sur la façade de la collégiale. Nous prenons le petit sentier sous une porte ouverte dans le mur de l'enceinte qui nous mène au chemin de ronde. Le chemin est bordé de rosiers de collection. Plus de 450 rosiers, issus de 300 variétés différentes, ornent les rues et les calades du village, conférant aux vieilles pierres un charme incomparable. Chaque rosier est étiqueté avec son nom, celui de son obtenteur et de sa variété. 

Nous parvenons au chemin de ronde qui contourne la roche sur laquelle le chateau a été érigé. Le Château de Grignan domine les plaines et montagnes environnantes depuis un promontoire rocheux. Témoin de l’architecture Renaissance et du classicisme français, il incarne l’histoire mouvementée de la région. Mentionné dès le XIe siècle comme château fort, il est transformé à la Renaissance par la famille des Adhémar en une somptueuse demeure de plaisance. 
Le chatelet d'entrée, la nouvelle chapelle Saint-Romain et une partie du logis seigneurial sont oeuvre des Adhémar (première moitié du 13e siècle). Les défenses de l'ouvrage d'entrée et la poterne sont renforcées à la fin du 13e ou au début du 14e siècle.  Le châtelet défensif par lequel nous entrons aujourd’hui, et qui a été totalement restauré au 19e siècle dans un style troubadour, a été créé en 1357. Il était alors agrémenté d’une tour d’angle et d’un pont levis qui a disparu au 18e siècle. Quand on franchit cette porte on contourne l'aile droite pour se trouver face à l’édifice Renaissance. On en a une vue tronquée car la cour est occupée par la scène et les gradins du théâtre de plein air où se tient le festival . La Renaissance, au 15e siècle, et surtout au 16e, va une nouvelle fois apporter son lot de transformations, notamment grâce à deux membres de la famille, Gaucher Adhémar et son fils Louis, qui sauront donner encore plus de prestige à leur nom, et toute la grandeur à leur résidence.  

Gaucher Adhémar, échanson du Dauphin de France  puis écuyer du roi Louis XI, épouse ainsi Diane de Montfort, originaire du royaume de Naples, qui lui apporte les titres de duc de Termoli et de comte de Campobasso. Fort de ses titres, Gaucher souhaite un château à sa hauteur. Dans cette période pré-Renaissance, où la fonction défensive n’est plus de mise comme au Moyen-Âge, il fait construire l’escalier d’honneur dans la tour féodale, impressionnant avec ses voûtes grandioses à croisées d’ogives, ou encore une galerie d’apparat, appelée aujourd’hui la galerie des Adhémar, baignée de lumière grâce aux nombreuses ouvertures donnant sur la cour du Puits, et bâtie en partie sur la chapelle Saint-Romain. Cette architecture est déjà connue en Provence grâce aux œuvres de Francesco Laurana.  

Nous attendons la visite au pied de l' escalier d'honneur qui conduit à l'étage.

La guide nous présente les personnages illustres qui jalonnent l'histoire du chateau. Les Adhémar de Monteil cité plus haut puis le gendre de la marquise de Sévigné, François Adhémar de Castellane de Monteil, comte de Grignan  (Grignan 1629-Grignan 1714). Lieutenant général de la Provence de 1669 à 1714, il occupa la principauté d'Orange en 1673. En 1669, il épouse Françoise Marguerite de Sévigné (Paris 1646-Mazargues 1705), fille de Mme de Sévigné, et destinataire de la plus grande partie de la correspondance de celle-ci. Le comte François de Grignan meurt ruiné en 1714. Sa fille Pauline hérite de ses biens et de ses dettes et vend le château en 1732. Elle s’occupe de publier les lettres de sa grand-mère, celles de sa mère ont toutes disparu, mais, ne voulant pas laisser lire certains passages, elle les recopie et détruit la plupart des originaux. Il en reste très peu et on peut en voir un exposé dans une des pièces.

A la Révolution le propriétaire, Jean-Baptiste de Felix du Muy général de division et chargé de mission en Suisse, est déclaré émigré car absent. Conclusion : le château est mis à sac et pillé. La toiture et les 2/3 de la grande façade sont démolis en 15 jours. Le mobilier est vendu. Ses ruines restent célèbres pendant tout le 19e siècle et sont visitées par de nombreux touristes pendant leur Grand Tour. Il est acheté en 1902 par Boniface de Castellane qui espère pouvoir le reconstruire grâce à l’argent de sa femme, une richissime américaine. Mais son divorce l’en empêche et il disperse les quelques éléments architecturaux encore vendables pour payer ses dettes…Le château est finalement complètement restauré par Marie Fontaine, riche héritière française, entre 1913 et 1931. Il est vendu au conseil général de la Drôme en 1979 et devient monument historique en 1987. Grâce à des inventaires retrouvés les pièces sont de nouveau meublées selon leur style et leur destination à l’époque de Madame de Sévigné par des acquisitions ou des emprunts à des musées. Madame de Sévigné fait trois séjours au château de Grignan, d’une durée totale de quatre années : le premier entre juillet 1672 et octobre 1673 ; le second entre octobre 1690 et décembre 1691 ; le troisième entre mai 1694 et avril 1696. Elle partage la vie familiale et sociale des Grignan et découvre la Provence. Il faut, alors, 17 jours pour relier Paris à Grignan

Nous montons à l'étage. Sur la cheminée trône la Salamandre, emblème de François Premier, partiellement ruinée. Le roi François Ier, revenant de Marseille, où il avait rencontré le pape Clément VII et marié le futur Henri II avec Catherine de Medicis, accompagné de ses fils, de la reine et du duc de Vendome, est venu visiter le château en La salamandre, animal chimérique, est l'emblème adopté par François Ier. La présence à Grignan de cet emblème royal marque l'attachement de Louis Adhemar à la personne du roi dont il était un des familiers et des grands serviteurs et rappelle la politique de grands travaux conduite par Louis Adhemar dans la première moitié du 16e siècle au lendemain de la visite royale de 1533 (édification de la collégiale Saint-Sauveur (1535-1542), réfection des décors architecturaux de la cour du puits du château (1543-1547), ornementation de la grande façade sud (1555-1557). Ce bas-relief pourrait avoir orné une des salles du château de la Renaissance vers 1540 (avant 1547, l'affaire du massacre des Vaudois du Lubéron, l'emprisonnement de Louis Adhemar et la mort de François Ier) et avoir été caché plus tard, lors de la tourmente révolutionnaire, dans la collégiale Saint-Sauveur.

Dans la pièce suivante, une table est dressée. La guide nous explique qu'au temps de la marquise, il n'y avait pas de pièce dans les chateau consacrée au repas. 

Entre la fin du 16e siècle et la première moitié du 17e siècle s’élabore en France une nouvelle cuisine aristocratique : les saveurs du bouquet garni l’emportent sur celles des épices lointaines, le beurre règne en maître, le salé tend à être séparé du sucré et une pré-cuisine de bouillons, coulis et fonds de cuisson s’imposent pour élaborer les plats.

Le service à la française, apparu au Moyen Âge, se complexifie et se codifie au 17e siècle, notamment à la cour de Versailles. La table est couverte de nombreux plats chauds et froids respectant un plan symétrique rigoureux. En revanche, verres et bouteilles ne sont toujours pas posés sur la table et le convive sollicite un serviteur pour se désaltérer. Tout ceci nécessite une importante domesticité. Les hôtes, selon leur place, n’ont pas accès à l’ensemble des plats et ceux-ci, à peine touchés, sont resservis à d’autres tables, utilisés pour confectionner des farces ou pour nourrir les domestiques. La revente des restes entre dans les gages de ces derniers : ils chargent donc les plats et accélèrent leur rotation à la table des maîtres. Suivant les préceptes de la religion chrétienne, on respecte l’interdiction de consommer de la viande les jours maigres mais les jours de jeûne, on sert, en complément de l’unique repas, une collation de mets sucrés en soirée. Et pour saluer le passage d’un jour maigre à un jour gras, à minuit sonné, le « médianoche », ou « réveillon », propose un repas de viande, divertissement incontournable à la cour. Le service à la française a été codifié en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, mais c'est l'aboutissement d'une longue tradition. Déjà à Rome, on servait les mets, en services composés de plusieurs plats que l'on apportait sur des tables toutes garnies. Le service à la française réglait les diners et les soupers d'apparat de la noblesse et les banquets officiels. A la cour, seul le roi mangeait seul selon une étiquette rigoureuse. Cette étiquette pesante satisfaisait le roi Louis XIV car elle lui permettait d'asservir la noblesse. Le Régent et le roi Louis XV préféraient les petits soupers dans l'intimité. Cependant, on mangeait souvent seul ou à deux sur de petites tables volantes.Au début du service à la française, couteau, fourchette et cuillère sont disposés à droite, poser un couvert à gauche porte malheur. Les défauts du service à la française n'étaient pas minces cependant comme le soulignait le grand cuisinier Urbain Dubois dans "La Cuisine Classique". Si l'apparat était de mise, le risque principal était de manger froid ou au moins tiède, et il fallait un grand nombre de personnel, ainsi que de très grandes tables pour poser tous les plats d'un même service, ce qui ne favorisait pas la conversation sauf avec ses voisins immédiats. Selon André Castelot dans "l'histoire à table" , le service à la Russe fut introduit en France par l'ambassadeur à Paris du tsar Alexandre Ier, Kourakine, en 1810. Mais le service à la Russe ne s'imposa vraiment que sous le second Empire où au début du règne perdurait encore le service à la française sur les tables officielles impériales. Il n'est pas certain que le service à la russe soit seulement d'origine russe, car la mode s'en était aussi imposée en Angleterre avant la France.
La grande bourgeoisie adopta plus rapidement le service à la russe qui se caractérise par le découpage des viandes, des volailles et des poissons à la cuisine, la détermination d'un menu fixé à l'avance qui est le même pour tous les convives.


Nous entrons dans l'antichambre qui se trouve au centre de l'aile Renaissance du chateau.

 

Sur le plafond à la française, on retrouve la salamandre de François premier, symbole du feu.  La devise de François Ier, « Je nourris le bon et j’éteins le mauvais » (« Notrisco al buono stingo el reo »), reflétait la légende de la salamandre qui pouvait éteindre le feu. La pièce suivante est la chambre de la comtesse de Grignan qui à cette époque était une pièce de réception. Avant le XVIIIème siècle, le salon comme pièce de réception n'existe que dans les palais. Au XVII éme, c'est dans la « ruelle » (en fait, dans la chambre à coucher) que reçoit la maîtresse de maison allongée sur son lit, ou sur un lit de repos si elle dispose, comme Mme de Rambouillet, d'une chambre d'apparat, bleue ou non. On remarque ici ce somptueux cabinet espagnol où la comtesse rangeait ses bijoux.


La pièce suivante est remarquable. Le cabinet d’écriture fait partie de l’appartement que la marquise de Sévigné occupait lorsqu’elle séjournait à Grignan auprès de sa fille. Il évoque l’ambiance de repos, de lecture et d’écriture à la fin du 17e siècle. On y découvre ce portrait de madame de Sévigné, le meuble où sa fille répondait à ses lettres. Dans les Lettres de madame de Sévigné, seule les lettres de la mère existent, les réponses de sa fille qui devait aussi écrire dans une belle langue ne figurent pas. Sa fille, Pauline de Simiane qui a fait éditer les Lettres de madame de Sévigné, n'a pas communiqué les lettres de sa mère pour ne pas révéler l'intimité de la comtesse. " Pauline me paraît digne d'être votre jouet ; sa ressemblance même ne vous déplaira point, du moins je l'espère. Ce petit nez carré est une belle pièce à retrouver chez vous. Je trouve plaisant que les nez de Grignan n'aient voulu permettre que celui-là, et n'aient point voulu entendre parler du vôtre. C'eût été bien plus tôt fait ; mais ils ont eu peur des extrémités, et n'ont point craint cette modification. Le petit marquis  est fort joli, et, pour n'être pas changé en mieux, il ne faut pas que vous en ayez du chagrin. Parlez-moi souvent de ce petit peuple, et de l'amusement que vous y trouvez..."

Pauline de Simiane (1674-1737), la deuxième fille de Mme de Grignan, est belle, intelligente et ressemble davantage à sa grand-mère qu’à sa mère, sans doute trop rationnelle, par son tempérament passionné. Elle fait un grand mariage, se retrouve veuve assez jeune et passe le reste de sa vie dans une relative austérité. On sait qu'elle possède une résidence d'été près de Marseille, au château de Belombre, hérité des Grignan. Mme de Sévigné en parle du reste dans ses lettres.  C’est la première à donner au public un choix de lettres de Mme de Sévigné, choix qu’elle regrettera par scrupule religieux, en raison des histoires parfois un peu lestes où sa joyeuse grand-mère se complaisait. Par ailleurs, elle détruit les lettres de Mme de Grignan  dont la hardiesse cartésienne et les idées philosophiques lui semblent encore plus dangereuses.


Nous entrons dans une pièce intéressante par les portraits qui y figurent et qui permet un exposé par la jeune guide sur la propreté et l'hygiène au grand siècle. L'eau était effectivement un outil de lavages et de propreté dans l'Antiquité, ça l'était encore au Moyen Âge. Mais ensuite, il s'est produit quelque chose d'extrêmement complexe qui est difficile à expliquer : il y a eu, progressivement, une crainte de l'eau. 

Louis XIV ne se lavait pratiquement pas. La toilette, à cette époque, nécessite peu d'eau, mais des parfums en abondance. Et, surtout, du linge propre plusieurs fois par jour. Qu'est-ce que la toilette royale au temps de Louis XIV ? Un rituel plus théâtral qu'hygiénique, avant tout l'occasion pour les hiérarchies de la cour de se donner en spectacle. A huit heures, la nourrice, le chirurgien et le médecin entrent les premiers. Tous trois frottent le corps du roi pour effacer la sueur et changent sa chemise pour qu'il « ait ses aises ». Un valet lui verse sur les mains un flacon d'esprit de vin. A huit heures et quart, le grand chambellan ou le premier gentilhomme « de la chambre d'année » lui présente l'eau bénite. Le roi est habillé et peigné. Il est rasé un jour sur deux. Ni meuble ni objet de toilette devant lui, sinon un miroir tenu par un valet. Un peu plus tard, avant de se mettre à table, le roi s'assied sur sa chaise percée. Rituel quotidien scrupuleusement observé à la même heure. Le Roi-Soleil se frottait également les dents avec un mélange à base de plusieurs plantes ou épices, telles que l'anis, le romarin ou encore la cannelle pour avoir bonne haleine. Mais ça ne l'aura pas empêché d'avoir énormément de problèmes dentaires et une une haleine pestilentielle qui fait que les dames de la cour l'approchait en se pinçant le nez et en se protégeant d'une étoffe.

Un beau buste de madame de Sévigné et un portrait triomphant du comte de Grignan.
Nous sommes dans la salle du Roi avec cette cheminée Néo-Renaissance ornée de Fleurs de Lys. au centre de la pièce, un parquet marqueté dit au point de Versailles ; sur le mur de gauche, à droite, mur couvert d'un tissu moiré à motifs au-dessus d'un soubassement en boiseries, et portant quatre appliques à pampilles assorties au lustre central, plafond à la française aux poutres peintes (début 20ème siècle).

Un portrait de Marie Fontaine  la représentant assise dans un fauteuil à haut dossier, portant une robe bleue grisée, un manteau avec col de fourrure, le pied dépassant posé sur un coussin dans une pose très aristocratique du XIXe siècle. Elle a consacré sa fortune à la réhabilitation du chateau.


Ce cabinet, réalisé en placage d'ébène, comprend 2 portes sculptées de scènes antiques.


Encore une cheminée imposante.



Sur le plafond de l'escalier qui mène à la grande galerie, on a peint la généalogie des Adhémar. Les Adhémar possèdent la seigneurie de Monteil dès le XIe siècle. La famille dominera la région de Montélimar jusqu'au XIVe siècle. 

Entre le XIe siècle et le XIVe siècle, les Adhémar vont acquérir, construire ou étendre, autour de leur fief principal, de nombreux châteaux : Grignan, Châteauneuf-sur-Rhône, Rochemaure, La Garde Adhémar.
À leur apogée, ils contrôleront une trentaine de seigneuries : Grignan, par exemple, entre dans leurs possessions à partir du XIIe siècle. Au XIIe siècle, Montélimar fait partie du marquisat de Provence qui s'étend jusqu'au confluent de l'Isère et du Rhône. En 1198, la seigneurie de Montélimar est partagée entre deux frères, Giraud et Lambert Adhémar. Cet escalier constituait l'entrée principale Renaissance du Chateau.
La visite se termine par l'immense et impressionnante galerie des Adhémar. 
"Dans cette galerie, Marie Fontaine a ainsi conservé les boiseries en noyer et le parquet en chêne. “Mais elle a réinterprété tout le décor dans un style néo-Renaissance. Elle a choisi des poutres apparentes pour le plafond, a enrichi le décor de motifs du XX e et a ajouté l’électricité aux bougeoirs en fer forgé”.  Gaucher Adhémar avait fait preuve d’audace quand il a fait construire cette pièce immense, toute en longueur, fendue d’une dizaine de vitraux et ouverte sur la terrasse du château, au sud-ouest de la bâtisse. Il voulait ainsi montrer sa puissance. La galerie – véritable salle de réceptions luxueuse puis, au XVII e, scène de bals et de festins – est l’une des pièces qui lui a permis d’agrandir les lieux et de transformer cette forteresse médiévale en “demeure de plaisance”."


Belle visite par une guide très agréable. La révolution a détruit une grande partie du chateau, la restauration est globalement réussié mais les meubles et décors de madame Fontaine sont moins fastueux qu'au chateau de Vaux ou à Versailles.
Nous sortons sous une chaleur presque équatoriale, dernière vision de la façade inondée de soleil. 
















 

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