mardi 28 janvier 2025

ALLEMAGNE, HAMBOURG, SUR L'ELBE DANS LE FERRY62, CARMINA BURANA

 En sortant du Fishmarkt, nous attendons le ferry sur l'embarcadère. On est en plein vent, le pont est glissant, le froid glacial et les 15 minutes d'attente vont nous laisser gelés et grelottant pour une partie du jour. Le bateau-bus n° 62 passe toutes les 15 minutes. On monte dans le bateau comme dans un bus. Personne ne contrôle les tickets, on ne paye d'ailleurs aucun supplément si l'on dispose d'une carte de transport. Sinon, le prix, de l'ordre de 2euros, est le même que pour un transport en bus ou en métro. Il existe  8 lignes de ferry dans le port et sur l’Elbe. Pratique pour certains déplacements mais surtout bien agréables pour une petite croisière sur l’Elbe. La plus connue et la plus empruntée est la ligne 62 au départ de Landungsbrücken, qui longe à la fois le port, permet d’admirer la Skyline de Hambourg et le quartier riche et résidentiel d'Altona où il doit faire bon d’être séquestré. Elle dessert de nombreux points d’intérêts dont la plage. Face à l'embarcadère, le port qui vit 7 jours sur 7 et la multitude de grues. Le port est situé au fond de l'estuaire de l'Elbe à 144 km de la mer du Nord.


Juste après avoir quitté l'embarcadère, on remarque ce bâtiment dont l'architecture reprend quelques idées de l'Elbphilharmonie. C'est un ancien entrepôt transformé en bureaux et appartements de luxe sur le bord  de l'Elbe, le Stadtlagerhaus. Le bâtiment comprend un ancien bâtiment en brique sur lequel est placée une façade vitrée à double coque, qui comprend des appartements. Le bâtiment a été construit en 1880 comme moulin à vapeur par Albert Petersen et a reçu en 1903/04 une extension en forme de trèfle  qui a été utilisée comme silo. Le moulin a été reconstruit à la fin des années 1990 et la structure vitrée a été ajoutée ; le silo est pourvu d'un toit à pignon. De 1998 à 2001, le bâtiment a été reconstruit et agrandi selon les plans de Jan Stormer.Deouis l'arrière du bateau, on peut apercevoir la Elbphilharmonie et les silhouettes des tours et des clochers de la ville, les carcasses des grues du port.

Le port de Hambourg  est le troisième port à conteneurs le plus actif de toute l'Europe, derrière le port de Rotterdam aux Pays-Bas et le port d'Anvers-Bruges en Belgique. Au niveau mondial, le port de Hambourg se classe au 18e rang des ports à conteneurs. L’économie du Land, et notamment le secteur de la logistique, a pleinement profité de la mondialisation, du développement de l’économie asiatique et des mutations géopolitiques survenues en Europe après la chute du Mur. Le phénomène le plus marquant de ces deux dernières décennies est la montée en puissance du partenariat avec la Chine. La dynamique du port est cependant ralentie depuis la crise de 2008, et désormais freinée à la fois par des faiblesses structurelles dans un contexte de concurrence accrue, et une nouvelle donne internationale riche d’incertitudes.
La ligne de bateau bus 62 offre un extraordinaire contraste entre la rive gauche, industrieuse et morne avec une foret de grues et la rive droite qui longe le quartier le plus friqué de l'agglomération, Altona et Övelgönne. Altona est une ville, fondée par les danois pour concurrencer Hambourg et désormais un des quartiers de Hambourg. Cette agglomération de Hambourg, à proximité du quartier de St. Pauli, est un bel endroit où l'on trouve de vieilles et élégantes maisons, des avenues ainsi qu'une grande crête sur les bords du fleuve d'où l'on peut profiter d'agréables promenades, de beaux jardins  à travers dans lequel on peut flâner ou se reposer sous les grands arbres, contempler le trafic des nombreux bateaux qui circulent sur l'Elbe. Altona est un lieu important dans l'histoire des juifs en Allemagne: Après l’expulsion des Juifs d’Espagne puis du Portugal, nombre d’entre eux ont erré en Europe occidentale, cherchant où s’installer. On les trouvait à Londres, à Amsterdam et ailleurs. Ils atteignirent également Hambourg, mais y séjournèrent au début sans structure précise, risquant même d’en être expulsés, ainsi que le parlement local tenta de le faire en 1603. Les chrétiens de la ville finirent par accepter leur présence, et, neuf ans plus tard leur statut fut fixé. En 1611, ils achetèrent un terrain pour y ensevelir leurs morts à Altona, Hambourg ne leur permettant pas de le faire sur son territoire. En 1703, une nouvelle communauté sefarade se développa à Altona, et construisit une grande synagogue en 1770. Après le génocide, il reste à peu près 2500 juifs entre Hambourg et Altona. D'Altona, je n'ai pendant longtemps connu que la pièce de Sartre qui illustre bien l'état de la pensée des allemands après-guerre: " aucun de nous n'a été bourreau mais, d'une manière ou d'une autre, nous avons tous été complices de telle ou telle politique que nous désavouerions aujourd'hui. Nous aussi nous nous fuyons et nous revenons sans cesse à nous demander quel rôle nous avons joué - si petit qu'il ait été - dans cette Histoire qui est la nôtre, que nous faisons et qui déchire et dévie des actions que nous devons pourtant reconnaître pour les nôtres. [...] comment les magistrats invisibles - nos petits fils - nous jugeront-ils ? "

Avec leurs modes de vies souvent ostentatoires, les émigrés d’origine aristocratique qui voyageaient seuls ou accompagnés à destination de la ville-État allemande indépendante de Hambourg, et de la ville danoise voisine d’Altona, ne se sont pas mêlés aux marchands, érudits, artisans et travailleurs manuels qui peuplaient ces villes portuaires à la fin du xviiie siècle. 

Ils se sont fait construire de belles demeures avec des parcs et de beaux jardins qui flattaient leur penchant pour le luxe et les divertissements somptueux.
La plage de l’Elbe est  une vraie  plage : sable blond, bars de plage… en hiver des gens promène le chien ou les rejetons mais l’été, l’ambiance doit être toute autre.  Le quartier est évidemment très cossu, avec les jolies villas qui surplombent la plage mais de l’autre côté du fleuve, c'est un Hambourg beaucoup plus prolo. Le bateau bus vire à gauche et va prendre un bras.On passe devant le  Lotsenhaus Seemannshöft (station pilote Seemannshöft). C' est un bâtiment en briques construit en 1914 avec une tour de signalisation et d'observation  à l'entrée du port . Les pilotes du port et d'autres organismes, y sont hébergés.

Le Seemannshöft est la pointe d'un promontoire étroit au nord-ouest du quartier hambourgeois de Waltershoft, entre le Köhlfleet, un affluent navigable  de l' Elbe , et le cours principal de l'Elbe.

La maison pilote a été construite lors de l'agrandissement du port de Hambourg vers l'ouest. Elle a été conçu par le directeur de la construction et chef de l'ingénierie structurelle Fritz Schumacher  . Le bâtiment était destiné à être le premier monument de la ville pour marquer de manière impressionnante l’entrée du port. En même temps, il devait fournir l'espace nécessaire pour assurer un service de pilotage 24 heures sur 24.

Le bâtiment classé a été entièrement construit en brique. Fritz Schumacher considérait qu'un bâtiment en briques de clinker à joints sombres convenait parfaitement pour donner au port de Hambourg un symbole plein de force et de l'identité nord-allemande. Il était d'avis que la maison pilote exprimait très bien ce caractère.  Schumacher s'est identifié au bâtiment tout au long de sa vie. Le terminus du 62 est juste en face et on entreprend le chemin du retour. La clientèle est variée, des touristes, la plupart allemands et quelques étrangers, des usagers lambda qui reviennent du marché ou rentrent chez eux, 2 clodos, un homme, une femme, alcoolémie à 3 grammes, la femme pourra descendre en se cramponnant au bastingage, l'homme roupille sur la table, s'éveille parfois et boit le rosé à la bouteille...



Au retour, on a tout loisir pour admirer cette banlieue cossu d'Altona et de la plage.
On croise un bateau qui a une histoire. Long de 57 mètres, l'Elbe III  aidait les navires marchands à emprunter cette route maritime de tous les dangers pour rejoindre le port d'Hambourg. Le Elbe 3 est un ancien bateau-phare construit en 1888 au chantier naval Johann Lange dans le Vegesack. Après 90 ans de service il est maintenant amarré au port-musée Oevelgönne. Il est classé monument historique. L'Elbe 3 a une coque faite de plaques d'acier rivetées. Il a deux mâts dans le mât principal porte trois lampes d'une puissance de 500 watts. Il y avait des ancres pour maintenir le navire en position stationnaire. L'équipage était composé de 11 personnes qui étaient relevées tous les quinze jours. Nous quittons le bateau-bus au terminus Landungsbrücken puis nous prenons le métro jusqu'à la gare centrale. Nous voulons admirer l'architecture extérieure du Musée d'Art. Nous contournons la gare, cette partie est très mal fréquentée, beaucoup de junkies, de punks, de clochards, c'est sale, répugnant, il fait un froid glacial et Catherine n'aspire qu'à rentrer à l'hotel pour se réchauffer.

Nous allons prendre un repas chaud face à la gare dans un endroit très kitsch plein de maquettes de bateau. Le restaurant Shifferborse tire son nom de la bourse maritime de Hambourg. C'est un endroit où on signait les contrat de fret autour d'une bonne bière et de nourritures généreuses. On y déguste des plats roboratifs, sans raffinement mais c'est bien préparé, généreux, pas de la gastronomie mais on en a pour son argent.

 


Le clou de notre journée est le concert à l'Erbphilharmonie, enfin, je le pensais puisque j'ai retenu les places sur leur site. Quand on commande notre Uber, il neige plain pot, je retiens la voiture à 18h30 persuadé que le concert débute à 20h ce qui nous laisserait le temps de flâner dans le bâtiment. En fait quand je passe le code barre des places dans le portique d'entrée, il refuse de les lire. Le concert à lieu  en fait à 19h dans la salle de concert de la place Haendel. Pas de taxi, la queue et la cohue, la foire d'empoigne dès qu'une voiture se présente. On finit par en trouver un et on débarque à la Laeiszhalle 10 minutes après le début de la neuvième. Nous sommes au premier rang mais on nous installe sous le toit pour la première partie, au dernier rang. Comme le veut la tradition, l'Orchestre symphonique  et le Chœur de Prague  terminent l'année en beauté.


Ce concert met à l'honneur deux œuvres monumentales de la musique classique : La 9e symphonie de Beethoven et Carmina Burana de Carl Orff. L'Orchestre symphonique tchèque de Prague, accompagné du Coro di Praga et de trois solistes vocaux, se produit traditionnellement en début d'année avec ce programme.
  " Mon recueil d'œuvres commence avec Carmina Burana". C'est ainsi que Carl Orff s'est adressé à son éditeur Ludwig Strecker à Francfort en 1937. Il a lui‐même décrit cette œuvre en trois parties comme des chants profanes pour solos et chœurs, accompagnés d'instruments et d'images magiques. Musicalement mise en scène par l'Orchestre symphonique tchèque, l'œuvre est puissamment réalisée. Le Coro di Praga encadre la pièce avec un puissant chœur d'hommage à la déesse Fortuna, dont la roue du destin représente les hauts et les bas de la vie humaine. L'ouverture de la 9e symphonie de Ludwig van Beethoven, qui nous est familière, est accompagnée du texte de l'Ode à la joie de Friedrich Schiller : "Freude schöner Götterfunken, Tochter aus Elysium". Beethoven a consacré plus d'une demi‐décennie à ce chef‐d'œuvre et l'a fait dans un état de surdité totale. L'adieu triomphal avec lequel le chœur de Prague fait trembler la grande salle de la Philharmonie a un effet impressionnant qui respire le bonheur — et quoi de mieux que de commencer la nouvelle année avec un sentiment de bonheur satisfait.
Quand BEETHOVEN et ORFF se rencontrent lors d’une même soirée, c’est le choc des titans, l’explosion de joie pour tous les fans de grande musique chorale.
Et c’est le défi des excellents CHŒURS ET ORCHESTRE SYMPHONIQUE TCHEQUE DE PRAGUE qui sont devenu en quelques années incontournables pour ce répertoire hors du commun."

"La neuvième de Beethoven est une des compositions les plus connues au monde. Par sa conception, elle compte parmi les œuvres les plus brillantes et impressionnantes de Beethoven. Elle a fortement et profondément influencé l'histoire de la musique aux XIXe et XXe siècle et pas uniquement le genre symphonique. Dans le dernier mouvement, la voix humaine apparaît pour la première fois. Cet "hymne à la joie" (an die Freude) qui met en musique un poème de Friedrich von Schiller est devenu un symbole de paix entre les nations et les peuples du monde CARMINA BURANA de Carl Orff, l’oratorium le plus célèbre de tous les temps. Trouvé en 1803, dans un couvent de Haute-Bavière, ces textes de poètes anonymes des XIIe et XIIIe siècles, écrit  en latin, en moyen-haut allemand ou encore en français médiéval, n’ont jamais été traduit, mais sont chantés dans le monde entier." 

Cette soirée qui avait très mal commencé se termine en apothéose. Demain, visite de Lubeck.




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