Rappel la première partie: https://www.lemounard.com/2024/12/paris-centre-pompidou-le-surrealisme.html
L'exposition se poursuit par les Chimères. On commence par Chimère de 1938 par Max Ernst. Par son caractère composite et onirique, l'animal représenté ici s'impose comme un authentique emblème du surréalisme.
Se détachant sur un fond noir, lieu d'apparition du rêve, deux oiseaux se superposent, l'un silhouetté de bleu, l'autre puissamment modelé, figurant un aigle orgueilleux au torse féminin. Cette créature hermaphrodite à I' œil évidé peut passer pour un double fantasmatique de l'artiste, remplacée quelques années plus tard par la figure de Loplop. La peinture a fait partie de la collection d'André Breton qui s'en sert en 1933 pour illustrer la notion d'automatisme, au fondement de l'inspiration surréaliste.Dorothea Tanning "Birthday" en 1942.
peinture autoportrait, œuvre phare de l'artiste. C'est un exemple
impressionnant des premiers travaux de Dorothea Tanning lorsqu'elle a
été fortement influencée par l'école européenne du surréalisme. L'œuvre
porte un certain nombre de motifs qui seront par la suite représentés et
repensés à plusieurs reprises par l'artiste. Telle est l'enfilade des
portes ouvertes, une suite de perspectives infinies, la combinaison de
la nature et de la culture matérielle que Tanning a déployée dans son
costume. Les soies et les dentelles violettes victoriennes sont
définitivement une allusion à ses années d'enfance dans une petite ville
puritaine; poitrine nue - un message - un défi, une démonstration du
désir de se débarrasser du passé oppressant, des craintes de sa famille
pour le sort de sa fille rebelle. Et une jupe faite de feuillage
ressemblant à des algues peut être vue comme une envie de revenir à
l'harmonie naturelle. Au pied du modèle, un "lémur ailé": Cet animal fantastique est associé à la nuit, au monde spirituel, au monde inconscient des rêves.Dorothea épouse Max Ernst.
Suzanne VAN DAMME (1901-1986) - ÉCOLE BELGE SURRÉALISTE Les femmes prennent un malin plaisir à s’emparer des clichés érotiques au travers duquel le regard masculin fantasme souvent la femme, et à les subvertir. Suzanne Van Damme représente la tendance la plus fantastique du surréalisme en réalisant Couple d’oiseaux anthropomorphes (1946).
Marcel Jean, Armoire surrealiste (Surrealist Wardrobe), 1941. Extraordinaire armoire peinte par Marcel Jean sur le devant de laquelle s'ouvre en cascade un hallucinant emboîtement de portes et de tiroirs et en arrière plan un paysage.
Nous sommes rentrés au pays d'Alice. Lewis Carol est un auteur majeur pour les surréalistes. Aragon traduit des oeuvres de Lewis Carol qui devient un mythe. Les écrits de Lewis Carroll dans le mouvement
surréaliste, qui s’étend des années 1919 aux environs de 1960 sont importantes particulièrement, Alice au Pays des Merveilles et sa suite, De l’autre côté du miroir. Georges Malkine entreprend à partir de 1966 une série de peintures dont le motif principal est une construction architecturée improbable comme la "Maison de Lewis Carol".
Leonora Carrington, "Green Tea". L'art de Carrington est vraiment comme un passage dans un monde magique, où les limites de l'imagination ne seront jamais atteintes. « Thé vert » est un grand chef-d'œuvre qui emmène le public dans un pays fantastique de merveilles et d'énigmes.
« Thé vert » crée une atmosphère surréaliste pour un rassemblement mystique qui accueille des personnages anthropomorphes. Le tableau semble provenir d'une autre planète, avec sa teinte verdâtre et ses personnages d'une beauté mystérieuse. Par le recours au symbolisme et à l'allégorie, Carrington encourage les spectateurs à déterminer individuellement la signification du tableau.
Dans « Thé vert », l’auteure montre des personnages sous des formes humaines et animales, aussi réelles que fantastiques. La dégustation de thé apparaît comme un moment émouvant, qui évoque un rituel ou un voyage dans les eaux profondes de l’âme. La force de Carrington émane de sa capacité à façonner un récit à la fois imaginatif et intellectuel, qui ouvre la voie à la contemplation et à la compréhension. La femme est enveloppée dans une étrange camisole de force, Carrington a fait un séjours dans un hôpital psychiatrique. Elle fut une des épouses de Max Ernst avec qui elle vécut à St Martin d'Ardèche. Max Ernst a aussi été le mari de Peggy Gugenheim et de Dorothea Taning.
Dans la section Alice, une œuvre de Magritte tout ç fait différente de celles auquel notre œil est habitué. La nature est s transformée, . On peut même
parler d'anthropomorphisme, car au Pays des merveilles, un chat parle en énigme, un lapin porte des
vêtements, une chenille fume, et les fleurs ont des visages. La toile Alice au Pays des merveilles de René Magritte illustre cet anthropomorphisme. Elle représente un arbre feuillu au profil humain, et dans le ciel une poire aux traits humains apparaît parmi les nuages.
"Les valeurs personnelles" de René Magritte ; Dans une pièce sans fenêtre avec un ciel parsemé de nuages pour papier peint reposent des objets ménagers de taille disproportionnée. Magritte écrit à propos de cette œuvre : « … Du point de vue de l’utilité immédiate, que peut-on penser de l’idée que, par exemple, un ciel recouvre les murs d’une chambre, qu’une énorme allumette soit posée sur le tapis, qu’un énorme peigne soit posé sur un lit ? Une telle idée est en effet impuissante à résoudre un problème utilitaire posé par la vie en société. L’individu social a besoin d’un répertoire d’idées dans lequel, par exemple, un peigne devient le symbole qui permet de combiner certains événements dans lesquels il, en tant qu’individu social, s’efforce d’agir dans une société conformément à des mouvements que la société peut comprendre : le peigne sépare les cheveux individuels, le peigne sera fabriqué, vendu, etc. Chez moi, le peigne (et d’autres objets aussi) a perdu précisément ce « caractère social ». Il est devenu un luxe inutile, capable de « désarmer » le spectateur… » (Meuris, p. 140).
Portrait de Famille de Dorothea Tanning. Tanning explorent l'image de la famille traditionnelle et du foyer, subvertissant fréquemment les « valeurs familiales ».
Tanning est fascinée par le père, la mère, la famille, la condition de la femme et la sexualité. Le tableau est dominé par l'immense figure du père (ou du mari) portant de sinistres lunettes rondes en miroir à l'arrière-plan. La taille de chaque personnage semble entièrement dépendre de son statut au sein du groupe familial. La fille (ou l'épouse) pleine d'entrain avec ses grands yeux expressifs est assise au niveau de la table avec son linge impeccable et ses plats étranges, éclipsant la gouvernante qui est à peine plus grande que le petit chien sur son arrière-train mendiant son dîner. Les couleurs atténuées ajoutent à l'atmosphère inquiétante et oppressante. Portrait de famille est un drame gothique de banlieue fait de tensions cachées et de changements d'échelle comme dans le Pays aux Merveilles qui persistent de manière troublante dans la mémoire.
Rene Magritte "Les exercices de l'Acrobate"
Les exercices de l’acrobate. Corps fragmentés, méandres de notre pensée qui accompagne les méandres de l’acrobate. Fusil, et trompette fond de ciel très figuratif. C’est le théâtre des illusions.
Puis un Acrobate Bleu Picasso 1929; "Le thème de l'acrobate est ici traité par une créature sans poids défiant la pesanteur.
Pablo
Picasso commence dès 1928 une série de nageuses et d'acrobates. Il
s'intéresse alors à la distorsion et à la malléabilité des corps qu'il
explore à travers différentes techniques. Cette forme tracée au fusain
et recouverte de peinture bleue, se détache sur la toile laissée vierge.
Les repentirs du dessin renforcent l'évocation du mouvement aérien et
dynamique de cet acrobate. Avec cette figure organique pourvue d'une
tête et de tentacules bizarrement étirées, Picasso capte la puissance de
la métamorphose du corps humain dans un style qui traduit l'influence
fugace du surréalisme."
Une oeuvre, très dérangeante...Hôtel du Pavot, Chambre 202 (Hôtel Poppy, Chambre 202) de Dorothea Tanning.
L'exposition continue par les monstres politiques, Hitler et Franco, mais la mémoire est sélective qui passe sous silence le camarade Staline.
Sous le thème « Monstres politiques« , l’exposition rappelle l’engagement des surréalistes qui ont non seulement bouleversé l’histoire de l’art, essaimé à travers le monde et accueilli des artistes femmes mais ont aussi lutté contre le totalitarisme et dénoncé le colonialisme. Voir par exemple, l’affiche « Ne visitez pas l’Exposition Coloniale » (1931).
«Cache toi, guerre», un dessin réalisé à Prague en 1944. TOYEN (Marie GERMINOVA, dite) [tchèque] (1902 -1980). Au plus loin des solutions réalistes de l’art engagé, elle figure un monde dont tout horizon a disparu, mais où ne subsistent, comme surprenants révélateurs de l’atrocité de l’époque, que jouets brisés et
spectres animaux, témoins muets de l’innocence et du merveilleux anéantis. Justement ce que, durant cette
période, Toyen n’en continue pas moins d’affirmer, envers et contre tout.
Portrait charge de Franco par André Masson.puis celui de Hitler par Brauner.
De fait, la défiguration opérée (par les clous, le marteau, le poignard,
la lance) transcrit sous forme de caricature la sauvagerie du
dictateur. Brauner inflige au portrait de Hitler des blessures
irréparables, lui crevant les yeux et lui bouchant les oreilles. La
bouche est clouée et augmentée d’une ouverture mécanique, comme le
réservoir de discours répétitifs et éructés. Le personnage, au visage
lacéré, aux sens dévastés, dont la tête paraît posée sur un billot, est
empalé par un parapluie, grotesque couronne. Avec ce portrait charge,
Brauner stigmatise très tôt la vulgarité de la barbarie et
l’anéantissement de toute forme d’expression, comme il le confie, en
février 1945, à Breton dans un brouillon de lettre : « Monsieur Hitler
m’a défendu de peindre, interdit de vivre » (Victor Brauner. Écrits et correspondances, op. cit.,
p. 158). Il est à noter que Brauner peint ce portrait en 1934, au
moment où la France traverse une inquiétante crise politique opposant
les groupes extrémistes de l’Action française aux partis de gauche, au
moment aussi où le surréalisme connaît des dissensions internes quant à
son adhésion au parti communiste français.
Salvador Dali: Construction molle aux haricots bouillis - Prémonition de la Guerre Civile 1936
Bien que Dali ait probablement commencé des études préalables à ce tableau dès 1935, l'œuvre fut préparée à Paris en 1936, alors que la multiplication des troubles armés en Espagne ne laissait que peu de doutes sur l'avenir immédiat du pays, sur « l'approche du grand cannibalisme armé de notre histoire, celle de notre guerre civile à venir."
Le Présent Magritte 1938; Quelques jours après l’invasion de la Belgique par les troupes allemandes, les menaces que font peser sur lui son activisme au sein des groupes intellectuels opposés au fascisme conduit René Magritte à prendre la route de l’exil. Il séjourne à Carcassonne où le poète Joë Bousquet (1897- 1950) reçoit nombre d’écrivains et artistes ayant rejoint la « zone libre ». Les tableaux peints à Carcassonne expriment sa nostalgie, témoignent de sa solitude. Son épouse Georgette a en effet refusé de le suivre sur la route de l’exil. Alors que les surréalistes se regroupent à Marseille dans l’espoir de pouvoir rejoindre les États-Unis, Magritte ne pense qu’à retrouver la Belgique.
"Parmi les quelque cinq cents œuvres exposées, celle qui illustre
l’affiche de l’exposition du Centre Pompidou est particulièrement forte,
c’est « L’ange du foyer » qu’a peint Max Ernst
en 1937, dans l’Europe en proie aux soulèvements fasciste, franquiste
et nazi. Le tableau au titre ironique traduit le désarroi de l’artiste
face à la montée de la terreur."
La pièce suivante est consacrée au "Royaume des Mères".
Croissance des plantes la nuit 1922 - Paul Klee. Une oeuvre qu'on est surpris de trouver ici. L’art de Paul Klee a absorbé le cubisme de Pablo Picasso et le constructivisme du Bauhaus, courant artistique d’avant-garde. Lignes simples, couleurs criantes – son style semble relâché au premier abord, mais s’avère, en effet, bien réfléchi. Ici vous ne verrez pas de peintures à l’huile de grande dimension, qui encenseraient l’ego de l’auteur. Ses dessins et aquarelles sont modestes et esthétiquement plaisants.

« L'image est un paysage fantastique, éclairé par une lumière
surnaturelle gris-violet. Sur le fond de l'espace désertique, il y a
plusieurs objets étranges qui n'ont absolument aucun lien entre eux : un
cactus, des haricots, une figure jaune et une sorte de bâton
« hirsute ». Un nuage sombre occupant le côté droit de la toile plane de
manière menaçante sur le champ. Le titre de l'œuvre non seulement
n'explique pas ce qui se passe mais, comme c'est souvent le cas chez les
surréalistes, crée un mystère encore plus grand, rendant ainsi le
public curieux »
De cette endroit, belle vue sur les toits de Paris et les tours de la Défense. Le ciel se grise, demain, il va neiger toute la journée. Une œuvre étrange, de Brauner, je crois
La fée Mélusine est condamnée à se métamorphoser en serpent de la taille jusqu’aux
pieds une fois par semaine. Ce mythe médiéval connaît un succès durable dans
l’imaginaire surréaliste. Dans L’Union libre, André Breton compare la femme aimée à
des végétaux .
Paul Delvaux est connu pour ses peintures à l’huile qui mêlent des éléments du surréalisme à des formes classiques. Un thème récurrent dans l’œuvre de Delvaux est celui des femmes nues, allongées de manière incongrue ou errant silencieusement dans des bâtiments classiques ou des gares, associées à des motifs tels que des squelettes et d’autres objets inattendus. Profondément redevables aux œuvres de de Chirico et Magritte , les scènes de Delvaux sont caractérisées par de longues ombres, des atmosphères oppressantes et des juxtapositions troublantes. À propos de l’influence de de Chirico, Delvaux a dit un jour : « Avec lui, j’ai réalisé ce qui était possible, le climat qu’il fallait développer, le climat des rues silencieuses avec les ombres des gens qu’on ne peut pas voir. »
Nous sommes maintenant dans la salle "Forets" avec La "Nature à l'aube" de Max Ernst. Une scène de poursuite chargée d'érotisme : venant de la gauche, un oiseau anthropomorphe se fraie un chemin à travers un fourré aux allures de jungle. Son objectif est la figure féminine nue accroupie dans le coin inférieur droit du tableau. Le tableau aborde le sujet de l'art lui-même - l'inspiration érotique du processus créatif et l'immersion de soi dans une autre sphère. Dans les œuvres de Max Ernst, la forêt ne représente pas seulement le monde en tant que tel, la nature et ses côtés sombres ; elle représente également sa transformation esthétique et sa recréation. La figure fantôme de l'oiseau représente l'alter ego de l'artiste. Nous sommes dans la salle de la "Pierre Philosophale". Nouveau tableau de Brauner. Réfugié pendant la guerre dans les Hautes-Alpes, il s’initie aux tarots, à la kabbale, lit les romantiques allemands et réalise un ensemble d’œuvres ésotériques telles que La Pierre philosophale. Brauner décline là dans un style lisse une thématique personnelle et récurrente - ésotérisme, animisme, paysage sylvestre nocturne, thème de la femme-mère - qui constitue l’univers poétique de “l’empereur du royaume du mythe personnel” (“Proclamation” et “Deuxième autocouronnement”, Le Surréalisme, cat. expo. 1947).Une des cartes du jeu de Tarots d'André Breton. En d’autres termes, jouer, s’amuser, rire sont, dès le
début du mouvement surréaliste, vécus comme un affranchissement de la pesanteur du réel, tant le jeu soumet l’esprit des joueurs à une attitude désinvolte à l’égard des contingences, des routines, des contraintes matérielles. Le jeu permet en outre de
provoquer par l’aléatoire et l’automatisme une production poétique de l’inattendu et, souvent, de la rencontre fortuite de réalités lointaines.
"L'Empire des lumières" est une série de tableaux de Magritte peints entre 1953 et 1954. Les tableaux dépeignent l'image paradoxale d'une maison, la nuit, avec deux fenêtres allumées, éclairée par un seul lampadaire, sous un ciel de jour. La peinture avait inspiré le réalisateur américain William Friedkin pour le célèbre film d'épouvante L'exorciste (1973). "Le surréaliste qu’est Magritte a ainsi juxtaposé deux réalités paradoxales, qui ne coexistent jamais et c’est ce qui crée cette impression d’étrangeté presque de malaise.
Les thèmes du rêve et de l’inconscient, chers aux surréalistes, sont présents dans cette maison dont les habitants sont, semble-t-il, prêts à plonger dans le sommeil une fois les lumières de la chambre à l’étage éteinte. Quant à la maison, elle est un motif récurrent dans l’inconscient, interprété comme une projection du moi, de ses aspirations et de ses angoisses."
ÓSCAR DOMÍNGUEZ (1906-1957) Machine à coudre électro-sexuelle. "La relation entre Machine à coudre électro-sexuelle et les surréalistes parisiens est évidente dès le thème lui-même, car cette image semble être une réinterprétation déformée par Domínguez de la célèbre phrase : « Belle comme la rencontre fortuite d'une machine à coudre et d'un parapluie sur une table de dissection. » Ces mots, tirés des Chants de Maldoror , les poèmes de l'écrivain du XIXe siècle Isidore Ducasse, dit comte de Lautréamont, étaient considérés comme un précurseur essentiel de l'esprit surréaliste. Dans Machine à coudre électro-sexuelle, la dissection semble être en cours. On assiste à une étrange opération chirurgicale abusive, le fil de la machine à coudre étant remplacé par du sang qui est canalisé sur le dos de la femme. La plante elle-même pourrait même faire écho au parapluie de de Lautréamont. Domínguez a repris l'un des mantras centraux de l'univers surréaliste de Breton et l'a poussé, par une combinaison de talent pictural et de semi-automatisme, afin de créer une vision absorbante et obsédante qui touche au vif l'esprit du mouvement."
Une toile de Francis Picabia 1925, "Les Amoureux, 5après la pluie).« Picabia surréaliste se situe dans le domaine de l'automatisme rythmique, générateur de signes, et paraît s'attacher plus à l'action de peindre qu'à l'œuvre achevée en particulier, pour une des toiles préférées de Breton, Après la pluie, qu'il conserva toujours dans sa collection et qu'il reproduisit en 1928 dans son livre Le surréalisme et la peinture. » Maria Lluïsa Borràs.
"En 1925, alors que le « Manifeste du surréalisme » est paru l'année précédente et qu'André Breton, chef de file du groupe, rend hommage dans son article « Le surréalisme et la peinture » au rôle précurseur de Picasso, celui-ci crée une œuvre exceptionnelle et déroutante par ses formes enchevêtrées et ses couleurs stridentes: « Le Baiser ».
La jeune génération révolutionnaire des surréalistes, nourrie de
psychanalyse et inspirée par les arts extra-occidentaux, semble
provoquer une forme de libération dans l'art de Picasso. Les parures et
les masques océaniens aux couleurs vives et aux formes ondulantes se
retrouvent ici dans les aplats roses, bleus, verts, jaunes, blancs,
délimités d'un épais cerne noir et aux motifs presque radiographiques,
qui révèlent des corps se confondant jusque dans la fusion. Les deux
bras longs et forts de l'homme enserrent le corps de la femme : ses
pieds aux orteils écartelés ne touchent plus le sol, elle devient
prisonnière de l'étreinte. Une unique bouche réunit les deux amants dans
l'érotisme violent du baiser, préliminaire sexuel intense où le
nez-sexe masculin et la bouche-sexe féminin sont irrépressiblement
attirés et repoussés l'un par l'autre."
Dans le bas de la toile, on remarque trois groupes de personnes. Au premier plan, un couple enlacé, dont l’un des personnages est un rocher anthropomorphe ; au second, une silhouette qui évoque celle d’un jeune homme marchant vers l’horizon. Le dernier groupe, visible à l’arrière-plan, en très très petit, se compose d’un enfant et d’un homme. Toutes ces figures, qui
projettent des ombres très nettes et découpées sur une surface de terre desséchée d’un vert grisâtre, sont situées dans un espace ambigu qui rappelle les espaces peu profonds que construisait Joan Miró, et où, à partir de l’horizon, les images semblaient flotter."
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