Depuis longtemps, nous voulions tester la cuisine de Renaud Darmanin, étoilé depuis 2018 à l'auberge de la Tour à Marcolés dans le Cantal. Marcolés fait partie des " plus beaux villages de France", nous le revisiterons après le repas auquel nous convient nos amis et partenaires du voyage au Japon. L'auberge de la Tour est installée dans un superbe bâtisse du XVIIème siècle avec une tour d'angle et un escalier à vis. La maison a été superbement restaurée avec de superbes lustres dorés de Machina della Luce de la collection Luci d'Oro de Enzo Castellani. Nous sommes accueillis par l'équipe de salle, Michael, le maître d’hôtel, Jean Michel le sommelier et un jeune futur diplômé, Matéo, qui nous rappelle notre petit fils: il termine ses études d’hôtellerie avec passion et son service va enchanter notre repas. Il compte parfaire son expérience après ce passage à Marcolès, par une expérience à Genéve dans une autre table étoilée.
Le sommelier nous propose de commencer nos agapes par le Tonton, un cocktail fabuleux qui n'a rien à voir avec son funeste homonyme. " Le Tonton est un nectar d’une subtile finesse, où myrtilles et châtaignes viennent joyeusement faire danser vos papilles pour un grand moment de plaisir. Symbole et incarnation du Massif central, auréolé deux fois de la médaille d’or au Concours international des liqueurs à Lyon". Le cocktail est à base de vin blanc, mais myrtille et châtaigne sont accompagnées d'un décoction de différents fruits comme les quetsches et beaucoup d'autre. Avec le Tonton, quelques amuse-bouche, le premier au potimarron avec une tuile diaphane au cèpe,puis un baba à la liqueur de châtaigne et un délicieux petit acra. le Tonton répond à la règle du 3, 6, 9 :
Ensuite, on nous propose une déclinaison de châtaigne avec un velouté agrémenté d'huile de noisette, un beurre de châtaigne avec un pain de châtaigne itou et un délicieux cromesquis de châtaigne et foie gras que j'aurais du engamer d'une seule bouchée pour ne pas décorer gilet et pantalon. Inutile de préciser que Marcolés est au cœur de la Châtaigneraie cantalienne. L'interprétation de la châtaigne par le chef m'enchante et m'évoque un autre grand adorateur de la châtaigne, Claude Brioude à Neyrac en Ardèche qui a commis un superbe livre de recettes, "Châtaignes" en 2012 :"Aussi loyale que royale, la châtaigne ne vole la vedette à personne. Ce produit rustique et nourrissant mériterait sans doute l'oscar du meilleur second rôle en cuisine."
Pour commencer notre repas en 9 services, nous choisissons un Grand Cru Riesling de Hubert Metz de 2014.. C'est d'abord " l'Envie du Moment", la châtaigne se marie à la noix dans un tagliatelle capée d'une lamelle de Salers.
Puis la fête commence avec un Ceviche de Sandre sur un lit de Trompettes de la Mort avec une couronne d'amandes, quelques tiges de sucre tiré. Le sandre est le poisson roi du barrage de st Étienne Cantalès et la trompette connaît une saison très faste cette automne.
https://www.lemounard.com/2024/10/randan-les-champignons-dautomne-pieds.html.
De mes voyages en Amérique du Sud, j'ai gardé un amour sans modération pour les ceviche et celui-ci me convient parfaitement, le pairing avec le riesling est judicieux. Le plat suivant est une balade en foret, dans les bois de l'Enseigne , par exemple, où j’aimai traquer le cèpe quand j'étais installé à Aurillac. Le plat s'intitule Girolles, Riz noir et Oxalis et se présente comme une promenade dans les sous-bois du Cantal. Une tuile évoque une feuille morte comme celles qui flotte dans la fontaine devant le restaurant, le riz noir est aggloméré pour imiter une souche de bois noir, là où se plaît la chanterelle grise, le bois mort a été frotté avec du lard des cochons du Cantal qui produisent une viande de caractère,
il y a des girolles, une duxelle où les champignons que l'on cueille ici se mélangent, tricholomes de la Saint Georges que le chef pulvérise au printemps, pieds de mouton, chanterelles en tube, un jus corsé, quelques touches vertes d'ail des près, des feuilles d'oxalis. C'est Matéo qui présente le plat avec un brin de poésie qui lui vaut quelques moqueries complices venant du maître d’hôtel. les feuilles de l'oxalis surnommée « Oseille des bois » ont un goût acidulé.!
Ensuite, l'Oeuf parfait façon Rossini donc reposant sur une tranche de foie gras peut etre un peu trop cuit ce qui lui ote une partie de sa saveur et... la châtaigne. L'assiette est très bien présentée avec une purée de châtaigne et une ceinture de jus de viande.
Le fromage travaillé par le chef est une surprise. Le verre qui contient la préparation est déposé sur un petit réchaud qui chauffe le mélange: sue le dessus, la Fourme d' Ambert et au fond un mélange de crème et de fromage de Salers qui va donner une fondue goûteuse et généreuse mais ce n'est pas demain qu'on dose mon cholestérol. C'est spectaculaire et succulent, un peu canaille.
Le pré-dessert est une version revisité du tiramisu. Mateo utilise un shaker pour faire une émulsion à base d'Amaretto. C'est spectaculaire aussi et le résultat nous comble de bonheur. Un repas sans fausse note.

Agrumes et gentiane d'Auvergne. Le dessert est très rafraîchissant, un coussinet de pamplemousse, des quilles de Combava, du yuzu aussi et la gentiane dont on cueille la racine pour produire l'Avéze. Avec le café, des pâtes de fruits délicieuse et des quilles de combava. Le chef passe à la table et reçoit quelques compliments mérités. Une belle atmosphère, une cuisine de terroir dans la lignée de Régis Marcon et de Michel Bras, une étoile qui brillera longtemps sur les nuits cantaliennes.
Promenade digestive dans ce superbe village de Marcolès, des rues pavées, des maisons médiévales superbement décorées et une fabuleuse rencontre : on pousse une porte, une affichette indique que les instruments insolites et divers sont fabriqués par Mézigue, Mézigue nous reçoit qui prépare ses châtaignes et nous propose de nous asseoir. Une batterie de bric et de broc, des pédales qui enregistrent et répètent inlassablement les sons, une gamme de mortiers de pharmacie en cuivre qui fait un carillon, des instruments à vent à partir de tuyaux de douche, des flûtes indiennes fabriquées par Mézigue, en fait Zimphil et un concert improvisé. Philippe Henry est un chercheur, un trouveur, un trouvère, un poète, un doux dingue, sympathique, loufoque et talentueux, il est musicien, guitariste à la base, il joue à l'instinct, ne sais pas lire une partition, c'est un savant fou qui bricole des instruments qui jouent juste. Le maître nous improvise un concert, le son du vent, l'orage et la pluie, les mouettes, le cri des baleines, le ressac. la batterie donne différents tempos, c'est fou ce qu'on peut faire avec de vielles bassines, puis Zimphil (son nom de scène) nous joue un véritable morceau aux sonorités rock ou free jazz avec un étrange instrument à cordes couchés sur une table. Ce serait génial d'assister à un concert mais celui qu'il nous propose d'une façon impromptue, nous procure un immense bonheur, c'est désopilant et mélodieux, poétique à la fois. Nous le quittons à regret, déambuler dans le village est très agréable, un fabriquant d'hydromel, une boutique de mode, un spa qui a l'air de très bien marcher, les Four Fab qui traverse une rue du village. Les Beatles seraient passé par Marcolès en 1969 pour faire la couverture de leur album mais la ville ne possède pas de passage protégé.... Ils retraversent le channel pour faire la fameuse photo sur Abbey Road à Londres. Le 8 août 1969, les quatre musiciens traversent ce qui est aujourd’hui le passage piéton le plus célèbre du monde. Un passage piéton classé monument historique anglais depuis 2010. Pour la pochette d’Abbey Road, le onzième album des Beatles, Paul a une idée : il avait dessiné des petits bonshommes simplistes sur un passage piéton. C’est le photographe Iain MacMillan – photographe écossais rencontré par le biais de Yoko Ono – qui mettrait en œuvre l’illumination de Mac Cartney.
Merci , à Cathy et Serge, à Hélène de nous faire découvrir cette table, redécouvrir ce village magnifique et cet artiste et homme-orchestre extraordinaire et chaleureux.J'envisage de revenir à l'automne pour 2 journées gastronomie-champignons.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire