Depuis la rue Américaine et le musée Horta, nous gagnons la chaussée de Charleroi qui devient ensuite l'avenue Brugmann, la maison Hannon occupe l'angle de l'avenue Brugmann et de la rue de la Jonction.
La Maison Hannon a
été construite en 1902, à la demande du couple Marie et Édouard Hannon,
par leur ami l’architecte Jules Brunfaut. Conçue comme univers
symboliste et onirique, la maison est un des chefs-d’œuvre de l’art
nouveau à Bruxelles, union de l’art belge et de l’art français de
l’époque.
Après une formation chez Henri Beyaert, père de
l'architecture nationale, un passage à l'École nationale des Beaux-Arts
de Paris et des voyages d'étude en Italie, Jules Brunfaut construit dans le
style classique. Bien introduit dans la haute société, il
réalise plusieurs hôtels particuliers, des châteaux ou villas, mais
aussi des bâtiments industriels pour Solvay notamment. En 1892, suite à
son mariage avec une femme de la grande noblesse belge, il quitte sa
profession pour voyager et se consacrer à ses écrits et son activité à
l'illustre Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts
de Belgique. Son ami, Edouard Hannon lui demande de concevoir sa maison dans le style Art Nouveau. Hannon est ingénieur chez Solvay et ne souhaite pas choisir le meme architecte que la famille Solvay, Victor Horta.
Jules Brunfaut, peu familier au style nouveau, va s’inspirer d’autres maisons d’architectes de l’époque, tel que celles de Victor Horta (maison personnelle, hôtels Tassel et Wessinger), d’Ernest Blérot (maison personnelle, aujourd’hui détruite) et d’Octave Van Rysselbeghe et Henry Van de Velde (hôtel Otlet), qui pour la plupart figurent dans ma balade Art Nouveau sur Ixelle et Saint Gilles. https://www.lemounard.com/2024/01/bruxelles-lart-nouveau-en-balade-ixelle.html
Asymétrique, la façade étonne et s’impose comme une structure unique, mythique et typique du XXe siècle.
"L'élévation à front de rue comprend une travée sur l'avenue Brugmann, trois sur l'angle et deux sur l'avenue de la Jonction. Façade en pierre d'Euville rehaussée de brique blanche de Silésie et de pierre bleue. Elévation de trois niveaux, le dernier en entablement. Toutes les fenêtres sont à arc en anse de panier ou en plein cintre, à encadrement délardé d'une large moulure en gorge. Les appuis des baies sont moulurés, ceux du rez-de-chaussée et de l'étage forment des cordons continus. Haut soubassement profilé, percé de cinq jours de cave grillagés.
L'angle, traité en pierre blanche, compte trois travées, dont une disposée de biais. Trois fenêtres identiques aux deux premiers niveaux. Les travées sont délimitées par des cordons verticaux moulurés. Ces nervures partent du sol, forment les meneaux des trois baies du rez-de-chaussée et s'épanouissent en volutes pour former les du balcon devançant le second niveau ; ces dés maintiennent des grilles aux lignes graciles en fer forgé plat. Les nervures de l'étage montent jusqu'aux consoles de la corniche. Au dernier niveau, entablement ornés d'un bas-relief de Victor Rousseau La fileuse, allégorie du Temps.
"La façade vers l'avenue de la Jonction est animée par un beau jeu de volumes. En son milieu, une travée s'inscrit en fort retrait aux étages, avec retours en pan coupé disposés de biais. Au rez-de-chaussée, cette travée est devancée d'un bow-window en saillie, sur assise incurvée, abritant un jardin d'hiver. La façade du bow-window est un chassis
à petits-bois curvilignes, insérant des vitraux à motifs végétaux de
Raphaël Évaldre, disciple de Louis Comfort Tiffany. Son petit toit est
couvert de zinc. Au-dessus du bow window, trois fenêtres sous une corniche en chapeau de gendarme."
L'hotel Hannon mele le style beaux-arts à l'Art Nouveau. "La Maison Hannon est une œuvre singulière, une maison intime et personnelle, réunissant les goûts et passions de ses commanditaires."
On pénètre dans l’hôtel par la porte du jardin. Après la billetterie , on accède dans le grand hall qui est baigné de lumière et ornée d'une fresque monumentale de Paul Baudoin qui évoque la passion d'Edouard Hannon pour l'antiquité. C'est une allégorie de l'amour ou Edouard Hannon et son épouse sont représentés par un couple de bergers qui contemplent une femme qui répand des roses. 6 femmes s'envolent dans le ciel une lyre à la main qui symbolisent l'harmonie de la nature. Paul Baudoin est un peintre français né le 24 octobre 1844 à Rouen, il a consacré sa carrière à la redécouverte et à la diffusion de la technique de la fresque sur mortier frais. Il a fait ses études à l’École des Beaux-Arts de Paris. Dans les années 1870, il s’est perfectionné à la peinture décorative auprès de Puvis de Chavannes. A l’intérieur, Brunfaut n'use pas d'un puits de lumière pour apporter de la lumière zénithale sur sa cage d'escalier comme l'aurait fait Victor Horta.
A contraire, il conçoit une belle coupole opaque qui couronne le décor de la cage d’escalier. Les motifs de la mosaïque du sol comme le sujet de la fresque, tout en évoquant l’antiquité classique, sont tout à fait caractéristiques de cette époque Art Nouveau.
L’hôtel particulier comporte 2 salons, le salon de réception, le Grand Salon qui donne sur l'angle des 2 rues et un salon familial, plus intime, réservé à la famille. Le Grand Salon est la pièce d'apparat et donne sur la serre derrière le grand bow-window. Les fresques sont également de Paul Baudoin avec un fond rouge pompéien et des toges romaines. On peut y voir les pommiers en fleurs puis la récolte des truits et la fabrication du cidre. D'autres fresques montrent la récolte du houblon pour élaborer la bière. Les verres sont remarquables fabriqués par Emile Gallé.
Les vitraux Tiffany d’origine sont exceptionnels, avec leurs délicats motifs d’iris d’eau, dont les teintes dorées évoquent l’heure du coucher de soleil.
Le petit salon est sobrement décoré mais ce sont aussi les meubles et les lustres de Gallé qui ornent la pièce. Ce sont en particulier les célèbres modèles aux Ombelles.
La
salle à manger réalisée par Émile Gallé en 1904-1905 est remontée dans son
ensemble, dans les nouvelles salles consacrées à l'art nouveau, avec son
riche mobilier, son lustre, ses verres et des tableaux évoquant
l’atmosphère de ces pièces au début du vingtième. lA salle à manger abrite « Portrait de famille
& Regards sur le monde », un ensemble de clichés signés Édouard
Hannon. L’ingénieur, également féru de photo, a participé à la fondation
de l’Association belge de photographie, œuvrant à faire de ce médium un
véritable art.
Sujets sociaux, architecture, industries, paysages,
photos de voyages, il a laissé une œuvre particulièrement riche en la
matière.
Au premier étage, outre les superbes vitraux Tiffany réalisés par l’atelier bruxellois Raphaël Evaldre , se tient une exposition temporaire de mobilier et d'objets Art Nouveau, en particulier de nombreux travaux de Hankar, des affiches et un très beau meuble de Gallé avec un poème de Verhaeren.
Dans le travail du bois, Hankar associe de façon très personnelle la complexité des ornements gothiques et japonisants. Contrairement à Horta qui reste fidèle à un décor abstrait, Hankar et de nombreux artistes de l'Art Nouveau recourent à un répertoire ornemental directement emprunté à la nature : fleurs, insectes, reptiles. On y découvre aussi l’œuvre de Gustave Serrurier-Bovy et des pièces d’Henry van de Velde.
Nous retournons à l’hôtel prendre quelques repos après avoir marché jusqu'au parvis de Saint Gilles pour prendre le pré-métro. Ce soir nous sommes invités à une soirée cheeses and Wines chez Fréderic et Anne dans le quartier de la basilique de Koekelberg . Les fromages belges ne manquent pas d’intérêt et Fréderic a sorti é bouteilles de derrière les fagots dans leur loft, un Condrieu sublime et un superbe Bourgogne rouge. Demain, nous sommes conviés à la répétition du trio de Fréderic, clarinette, violoncelle et piano au rez de chaussée transformé en grand salon de musique
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