Zap, Octopus, le Petit Gourmet, on distribue dans de nombreux commerces clermontois ces magazines gratuits qui nous tiennent informés des ouvertures et qui proposent quelques critiques gastronomiques ou vestimentaires. "Quand ils se sont lancés, les journaux gratuits ont proclamé contribuer – comme les autres - au pluralisme du débat et à la diffusion de la pensée. Seulement voilà, les temps sont durs. En janvier, y a moins de pub, y a des jours creux, comme le mardi. Du coup, pas de pub, pas de journal, le mardi. Pas de journal, pas de pensée, le mardi. C’est en substance ce qu’on vous a expliqué dans l’Instant M la semaine dernière." Philippe Vendel.
Mais ces journaux gratuits contribuent-ils objectivement au pluralisme du débat. Ils vivent de la pub et on quelques problèmes pour donner un avis objectif sur ceux qui les ont financés. Le Petit Gourmet est "un mensuel gratuit consacré aux métiers de bouche il présente aux lecteurs les chefs, les lieux et les saveurs à ne pas manquer." Enfin , c'est la vision idyllique qu'en fait le Petit Futé. J'ai donc lu, le magazine de Novembre et l'article dithyrambique sur Rémi Laroque, l'Impulsif m'a donné l'eau à la bouche. " Attention uppercut, un dépaysement total, une expérience, une claque gastronomique". Nous avons donc pris la route de Chatel pour encaisser un uppercut qui s'est tout au plus avéré une chiquenaude ou une pichenette. Le cadre est élégant, épuré, deux menus sont proposés en 7 ou 9 temps, Omakase, "je m'en remets à vous en japonais". Chaque temps est proposé en 3 bouchées. Le Petit Gourmet persiste dans le dithyrambe "Le voyage sera magnifique grace à un travail de précision remarquable, la maîtrise des textures, les saveurs sublimées, le dressage artistique."
Pour expliquer notre critique, nous avons quelques expériences de grande cuisine japonaise en France, des restaurants 1 ou 2 étoiles donc nous serons assez exigeants sur la qualité des mets que nous allons déguster. La meilleure table, sans contexte pour moi, était le 14 Février à St Amour limite Bourgogne-Beaujolais qui a fermé cette année car le chef est retourné au Japon pour soigner ses vieux parents. Nous l'avons découvert avec une étoile puis revisité avec le meme ravissement quand il a obtenu la seconde.
https://www.lemounard.com/2014/11/14-fevrier-saint-amour-le-retour.html.
Autre belle table japonaise, le 14 février dans le Vieux Lyon. C'est moins flamboyant qu'à St Amour mais c'est une belle table.
https://www.lemounard.com/2015/02/le-14-fevrier-vieux-lyon-cuisine-franco.html
Pages à Paris, mais qui manque d’âme à mon gout.
https://www.lemounard.com/2018/02/restaurant-pages-paris-la-cuisine-de.html
Sola à Paris où on s'immerge totalement à Kyoto ou à Osaka.
https://www.lemounard.com/2022/11/un-japonais-paris-sola-la-cuisine-de.html
Pour nous ouvrir les papilles, on commence par un dashi. Le dashi est un bouillon de base
utilisé par les japonais dans leur cuisine à l’instar de notre bouillon
de volaille, de bœuf ou de légumes. Sa forme la plus fréquente
consiste en un simple bouillon élaboré en faisant bouillir des algues konbu et des flocons de bonites séchées et en ne conservant que le liquide résultant.bPour accompagner ce repas, nous choisissons un Sancerre de chez Bourgeois et un verre de Syrah du Languedoc. Les bouchées apéritives sont servies en 2 temps. C'est bon mais rien de transcendant. Chaque temps propose 3 bouchées: dans la petite coupelle une salade typiquement vietnamienne que le chef tient de sa grand mère, le riz soufflé est utilisé pour le troisième.
Deuxième service de bouchées apéritives. Il y a là un classique de la cuisine japonaise, la tempura de crevettes. la tempura est caractérisée par la légèreté de la pate croustillante et sa finesse. La troisième bouchée est surmontée d'une crème à l'ail noir, de Billom, je suppose.
On nous sert ensuite le bœuf d'Aubrac aux petits oignons, en 3 façons qui s’inspirent de la gastronomie japonaise.J'ai quelque difficultés à comprendre l'enthousiasme de la journaliste, ses superlatifs "proposer un voyage qui ne se fait pas ailleurs ,jusqu'au dessert vous serez ébloui". Nous devons être un peu blasé, peut être avons nous trop voyagé mais malgré un effort de bonne volonté, nous ne décollons pas de Chatelguyon.
Arrive le foie gras, de bonne facture avec ses mures marinées et un condiment à l'ail noir.
Ensuite ce sont les maquereaux grillés avec des tagliatelles à l'encre de seiche servis avec une bisque de crustacés dans l'esprit d'un Tom Yum. Le Tom Yum est un soupe thaï ou laotienne currys aigre-épicée-pimentée.
On continue dans le poisson avec le lieu jaune cuit meunière, un jeu de textures autour du chou frisé, avec une crème d’huître parfumée à la citronnelle et œufs tobiko. Très populaires au Japon, ces œufs de poissons volant sont incontournables. Ils sont petits, allant de 0,5mm à 0,8mm. Tous ces plats sont très bons mais pas dignes d'un restaurant gastronomique, c'est une cuisine prétentieuse qui voudrait avoir l'air et qui ne justifie pas l'extase de la journaliste du Petit Gourmet.
Pour accompagner la viande, j'ai choisi un verre de syrah du Languedoc, IGP du Gard, le Chamasutra 2022 qui est en fait un assemblage Merlot-Syrah. "Une robe rubis profonde étincelante qui révèle un joli fruité au nez autour d'arômes de fraises des bois et framboises. Structuré et complexe, le palais se caractérise par des tanins souples, une belle ampleur générale et une finale douce aux fines notes toastées. "
La viande est un magret de canard laqué du GAEC du Chamblanc servi avec une déclinaison de topinambours et ume kosho avec un jus de viande épicé. Le ume kosho est un condiment confectionné à base de prune ume et de piment qui se présente sous forme d'une pate rouge. Le chef passe de table en table, un grand gaillard, physique de troisième ligne centre, rire sonore, qui attire la sympathie.
Deux desserts pour finir, d'abord la Déclinaison autour du chocolat Valrhona et de la mandarine.
Le deuxième dessert est un mariage de la cacahuète et des fruits exotiques. Tout est bon, rien ne mérite qu'on en garde un souvenir ému, rien ne justifie la pâmoison de la journaliste du Petit Gourmet. Ces dernières années, à 3 reprises, nous avons découverts des gens avant que le Michelin ne leur décerne l'étoile : l'Auberge de Montfleury en Ardèche, Jérémie Galvan dans le Vieux Lyon, l'Atelier Yssoirien. L'obtention de l'étoile nous paraissait évidente tant la cuisine que nous découvrions provoquait d'enthousiasme. Ici, le chef ambitionne l'étoile mais le chemin sera très long pour égaler celui qui lui a fait connaître la cuisine étoilée, Jean Claude Leclerc.
https://www.lemounard.com/2019/02/la-melano-l-auberge-de-montfleury-on.html
http://www.lemounard.com/2016/05/vieux-lyon-jeremy-galvan-le-cuisinier.html
https://www.lemounard.com/2018/02/issoire-latelier-yssoirien-par-dorian.html
Notre impression est donc très mitigée. Nous en voulons beaucoup plus au journal qui donne de cette maison une vision totalement faussée. Je suppose qu'avant de pondre cet article, le Petit Gourmet a reçu des publicités de l'Impulsif. Quand il a décidé d'y envoyer sa journaliste, il a prévenu la maison qui a proposé ce jour là le meilleur de sa table : Déclinaison d'omble de Stéphane Heinis, volaille désossée farcie au crabe, glace au sésame noir, fruit poché à la citronnelle, beurre blanc monté à la bergamote, combava et huître.
L'article parle aussi de l'umani. La cuisine japonaise distingue 5 saveurs, le salé, le sucré, l'amer et l'acide comme chez nous et l'umami qui serait incarné par la sauce soja et l'ail noir. Je suis certainement béotien mais je ne l'ai pas trouvé ici alors que je l'avais particulièrement apprécié chez Christophe Roure au Neuvième Art à Lyon.
Si la promotion 2024 de Michelin devait consacrer un nouvel étoilé en Auvergne, je mettrais plutôt une pièce sur la Petite Grange à Tournemire.
https://www.lemounard.com/2023/10/cantal-la-petite-grange-tournemire.html
Et non, le verdict est tombé qui me laisse pantois, l'étoile est décernée à l' Impulsif, espérons qu'elle sera filante car ici c'est une imposture, une caricature...incompétence des inspecteurs, copinage, favoritisme ??? on ne sait que penser, en attendant, nous partons 3 semaines au Japon en souhaitant une découverte plus réussie d'un cuisine qui mérite mieux que ce brouillon de culture nippone.
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