Nous avons eu la chance de visiter l'exposition Egon Schiele à la fondation Louis Vuitton à Paris en 2018 cf :
https://www.lemounard.com/2018/12/egon-schiele-la-fondation-louis-vuitton.html
et , aujourd'hui, nous découvrons la plus grande collection au monde d’œuvres d'Egon Schiele. Le Musée Leopold expose 42 toiles, 187 graphiques originaux (esquisses et feuilles colorées) et des autographes d'Egon Schiele. Nombre de ses œuvres majeures, comme « Autoportrait avec des fruits de lampion » ou le « Portrait de Wally Neuzil », appartiennent au Musée Leopold.
Il
peint parfois ces modèles ou ces autoportraits dans des positions
excentriques, non conventionnelles. Des poses extrêmes aux traits
déformés ou grimaçants pouvant créer une gêne chez le spectateur.
Certaines de ses compositions sont très audacieuses.
Il
a un grand aigu de la couleur et des contrastes, notamment dans les
contrastes de matières, alliant dans un tableau des parties en légers
glacis à d'autres très empâtées
Ici: Autoportrait à l'épaule nue relevée - 1912 Le visage empli d'effroi : la bouche est entrouverte et les yeux écarquillés. La panique est incarnée dans la peinture qui traduit une angoisse existentielle.
Self Portrait avec chemise repassée 1901 par Egon Schiele.
"Chez
Schiele, l' expressionnisme s’accompagne d’une forte tendance à
l’introspection, si bien que son esthétique violente et tourmentée
s’exprime dans une longue série d’autoportraits. Celui-ci est une œuvre
très précoce, peint alors qu’il avait à peine vingt ans. L’angoisse et
la démesure sont encore contenues, plus sourdes que dans ses œuvres plus
tardives.
Schiele se représente en jeune dandy. Habillé d’une
élégante chemise rayée, il arbore un haut front grisé, symbole de ses
importantes aspirations intellectuelles.
Cependant, sous sa chemise de jeune homme respectable, on sent poindre la violence et la sauvagerie.
Alors
que les manches de la chemise sont éclatantes de couleurs, le torse est
rapidement esquissé de quelques lignes clairsemées, créant un effet de
vide intérieur. Cet aspect fantomatique souligne son mal être, sa
difficulté à s’imposer et à s’accomplir.
Sa tête, à l’image des
manches de la chemise, est vivement colorée. Bourdonnante d’idées
folles, elle a une taille surdimensionnée si bien que son cou semble
bien trop fin pour la soutenir. Son esprit qui s’échauffe et s’emporte
rougit ses joues et ses oreilles. La chevelure touffue et ébouriffée,
les grands yeux interrogateurs et la mâchoire puissante et contractée
complète cet autoportrait sans concession d’un jeune homme en proie à
d’importantes tensions intérieures.
Comme souvent, Schiele se dessine
« en double », sous deux angles différents dans un même tableau :
l’homme respectable et celui qui est emporté par la folie. Ces
autoportraits jumeaux expriment la souffrance de celui qui découvre en
lui une ambivalence, des forces opposées, contradictoires et chaotiques
et qui lutte pour ne pas désespérer."
Astrid de Brondeau
-
Visionnaire II ou La Mort et l'Homme. Le second titre a été choisi par Schiele lui-même comme pour induire en erreur le spectateurs ou commentateurs naïfs, qui s’appliquent à voir l’Homme dans la figure en couleur, et la Mort dans la figure en négatif.
La Vienne 1900 s'interroge sur le spiritisme, la présence d'aura, les
dédoublements et les apparitions.
Visionnaire II, d'Egon Schiele,
montre un personnage qui se dédouble: un être se montre les yeux clos,
la peau à vif. Il est enlacé par une silhouette éthérée.
Schiele rencontre Gustav Klimt à l’automne 1910, alors que les deux artistes sont nouvellement voisins d’ateliers dans la Grünbergstrasse, près du château de Schönbrunn.
Ils font connaissance et échangent leurs dessins, se découvrant et
s’inspirant l’un l’autre. Bien que d’âge et de cercles sociaux
différents, les deux artistes resteront toujours en bons termes, et
l’amitié de Klimt sera pour Schiele un soutien important dans le milieu
artistique viennois du début du XXème s. Schiele célébrera cette amitié dans une de ses œuvres majeures : Les Ermites, de 1912, présentant les 2 amis comme des frères spirituels. Rudolf Leopold, avait commencé à collectionner des œuvres d‘art. Le premier tableau qu‘il a acquis
est déjà un chef-d‘œuvre: »Les ermites« d‘Egon Schiele, le seul tableau
dans lequel l‘artiste se représente représenté lui-même avec Gustav Klimt.
Rudolf Leopold a pu acquérir ce tableau en 1953. Pour financer cet achat,
il a dû investir 30.000 schillings autrichiens, une somme qui correspond
à l‘époque environ au prix d‘une coccinelle VW, promise à Leopold
par sa mère en tant que récompense de fin d‘études. Leopold préfère renoncer à cette voiture et acheter le Schiele.
“Leopold Czihaczek au piano” est une peinture impressionniste représentant l’oncle et tuteur légal de l’artiste. Egon Schiele l’a peint peu avant son 17e anniversaire et elle figure dans son catalogue raisonné de 1972. Le tableau perdu depuis 90 ans, a été retrouvé dans une collection privée viennoise lorsque son propriétaire a demandé conseil pour sa restauration. La concentration du pianiste, le cadrage de profil et la lumière douce flottant dans la pièce " donnent l’impression d’être entièrement immergés dans la musique".
Le «Nu à genoux avec les mains levées» d'Egon Schiele, 1910, est considéré comme l'une des œuvres d'art nues les plus importantes du XXe siècle. Son approche radicale et développée à l'égard de la forme humaine nue a mis au défi les érudits comme les progressistes. stricte université et a créé un tumulte sexuel avec ses lignes déformées et son affichage lourd d’expressions figuratives.A cette époque, la société trouvait le caractère explicite de ses œuvres troublant.
Ce tableau a été peint en 1912
Le tableau est un portrait qui représente le buste d’une femme (sa première amante). Elle est légèrement penchée vers l’avant et donne l’impression qu’elle nous regarde. La robe est sombre et simple avec un col blanc. Pour mettre en valeur le sujet le fond est clair. Le tableau est simple car il n’y a que la femme, une chaise et une plante et les couleurs sont peu variées. La tête de la femme est penchée et lui donne une expression inquiétante ou interrogative. Les couleurs de certaines parties de son visage sont assez vives, notamment sur les pommettes, les cheveux, les sourcils et les yeux mais le reste de son visage reste pâle. La femme est vue de face et sa tête de trois quart. Ce tableau est une huile sur bois, nous pouvons d’ailleurs remarquer les traces de brosses et de pinceaux. Le visage possède des traits de cernes. Le regard de la femme nous met mal à l’aise. Ce tableau a été saisi à New York dans le cadre d'une affaire de juifs spoliés par les nazis. Il appartenait à une galeriste juive, Lea Bondi, contrainte de le vendre à un collectionneur nazi il y a plus de 70 ans. Les yeux bleus clairs, hypnotiques d’une femme regardent le peintre avec un regard pénétrant mais en quelque sorte compatissant. Elle est vêtue de noir, un collier en dentelle blanc encercle son cou. Ses cheveux auburn encadrent un visage tourné un peu vers la gauche comme pour taquiner ou implorer; les coins de sa bouche tournent à peine vers le haut. À partir de l'automne 1911, Wally devient le modèle le plus fréquent de Schiele et aussi sa compagne. Elle vit avec lui dans une petite maison dans la forêt de Vienne où l'artiste a réalisé plusieurs de ses œuvres importantes dont Wally a servi de modèle mais aussi plusieurs représentations érotiques d'enfants. En , Schiele est accusé d'abus sexuels sur mineur et emprisonné. Wally est l'une des rares personnes à rester près de lui et à croire en son innocence. Elle lui apporte des colis en prison et se soucie de lui procurer un avocat.
Autoportrait avec lanterne chinoise. L'Autoportrait à la lanterne chinoise de 1912 est l'une des œuvres les plus célèbres d'Egon Schiele. Les tons de peau riches et l'œil brillant avec la pupille rouge sont des caractéristiques frappantes. "Une composition équilibrée avec rien de droit, chaque ligne a trouvé son prolongement ou un homologue correspondant: les cheveux et le corps se reflètent, parés aux bords horizontaux de l'image, avec ces coupes sombres équilibrées par les fruits de lanterne rouge vif. Dans une autre démonstration d'équilibre, la tête de Schiele est tournée vers la droite, son regard étant fixé directement vers l'observateur. La composition de l'image est particulièrement définie par des lignes nettes et une application virtuose de la couleur. De cette façon, l'artiste se présente à la fois fragile et confiant. L'œuvre a été conçue comme une contrepartie de son portrait de Wally Neuzil réalisé en même temps, ce qui explique la composition asymétrique."Portrait d'une femme en deuil.
Poldi Lodzinsky : Les influences de son mentor Gustav Klimt sont clairement visibles dans ses premiers travaux. Le portrait de Poldi Lodzinski de 1910 est encore fortement marqué par l'ornementation de Klimt, mais la représentation des mains est déjà expressionniste.
La Mère Aveugle composition tout en
angles, d’un brun sombre relevé de touches rouge vif, où l’on voit un
enfant téter au sein d’une femme sans regard.
Quelle: https://veryimportantlot.com/fr/news/socit-et-personnes/m%C3%A8re-aveugle--egon-schiele--quoi-o%C3%B9-quand
La Mère Morte :
Comme dans l’œuvre de Munch, l’amour et la mort sont liés dans l’univers de Schiele.
Révélation . Dans une lettre dont la traduction n'est pas évidente à comprendre Schiele explique son tableau:"
Cher Dr. E. (Engel)
« Révélation » - La
révélation d’un certain être; il peut s’agir d’un poète, d’un artiste,
d’un homme de connaissance, d’un spirite. – Avez-vous déjà senti
l’impression qu’une grande personnalité peut faire sur le monde ? Ce
serait un. - La peinture doit émettre de lui-même la lumière, les corps
ont leur propre lumière, qu'ils consomment de leur vie; ils brûlent; ils
ne sont pas éclairés. – Le chiffre à l’envers ? - La moitié devrait
ainsi montrer la vision d’une telle grande personne, que celle qui
influence s’agenouille en enthousiasme, se penche devant le grand qui
regarde sans ouvrir les yeux, qui désintègre, de qui coule orange astral
ou d’une autre couleur, en excès tel que celui qui s’écoule hypnotisé
dans le grand. - Sur la droite, tout est rouge, orange, brun foncé et à
gauche est l'être semblable à lui, qui ressemble différemment à celui
qui ressemble au grand droit. – (Fonction positive et électricité
négative.) Cela devrait signifier que le petit sur ses genoux fond dans
le grand rayonnant. Cela vous donne une idée de ma peinture. «
Révélation »
Egon Schiele.
Mère et Enfant.
Soleil couchant en 1913, présente une expression mélancolique de la nature. Les arbres sont ternes et malingres. Le tableau produit une sensation de froid lorsque la lumière disparaît. La lumière et la couleur sont essentielles pour les expressionnistes et là encore , Schiele s'inspire d' Edvard Munch. L’innovation première à partir de 1910, sera le contact direct avec la nature et le lien privilégié que Schiele va désormais entretenir avec elle. Il va mettre en place son propre langage expressionniste qui côtoie étroitement le symbolisme. Schiele aurait « le pouvoir de retourner comme un gant l’âme humaine » et révélerait au grand jour ce que nous nous empressons tant de cacher. Dans cette ville berceau de la psychanalyse, difficile pour un artiste impliqué dans une quête de la vérité comme Schiele de faire abstraction des nombreux questionnements qui sont alors soulevés. Vue depuis la colline du château de Krumau – aujourd’hui Krumlov – cet amas courbe de maisons peut être précisément identifié. Pour qu’ils se distinguent clairement, le peintre omet les maisons en arrière-plan et le pont et la rive opposée avec l’église Saint-Jolope. Il ne s'est pas intéressé à représenter la topographie, mais à dessiner, avec une touche cubiste, un réseau de lignes angulaires en forme de labyrinthe dont le centre de composition est situé sur la péninsule de type île. Avec leurs différents éléments de façades, de toits et de cheminées, les bâtiments ont l'aspect de la géométrie solide. Les bandes vertes et lilas suivent l'extérieur des maisons en accord sur elles-mêmes et les unes aux autres, comme des voix dans une fugue. Le sens du mouvement dans ce croissant est renforcé par la rangée d'arbres d'automne. Comme les limites linéaires entre la terre et l'eau noire, tous les arbres et les structures du terrain ont été composés en forme d'arc, ajoutant ainsi au remorqueur spatial du bloc de bâtiments.
"Les
sentiments de Schiele à l'égard de la maternité étaient extrêmement
complexes. Il avait une mauvaise relation avec sa propre mère, qui avait
tendance à pleurnicher sur son incapacité à remplir ses obligations
filiale plutôt que de le soutenir dans ses activités artistiques.
Du point de vue de Schiele, sa mère - pour cette affaire, n'était
que peu plus qu'une utilité, un moyen d'atteindre une fin. C'est
l'enfant qui a représenté la vie et l'esprit créatif, comme l'artiste
l'a confirmé dans son 1911.
Peindre la Naissance du Génie. Typiquement, Schiele dans cette peinture a pris un sujet traditionnel de l'art allemand.
Achevée en 1915, Mère et ses 2 Enfants représente une métamorphose mineure dans l'attitude d3e Schiele envers
la maternité. Au moins cette femme, contrairement à beaucoup de ses
représentations antérieures de mères, n'est pas
morte. La relation de l'artiste avec sa famille s'améliore, et ilrevoitr sa mère (qui a posé pour la peinture actuelle). De plus , sa soeur et son ami Anton ont eu un fils vers la fin de
1914. Le petit Anton Jr. lui sert de modèle pour les deux bébés dans Mère avec deux enfants III. Néanmoins, la peinture ne peut guère être
considérée comme un portrait de famille.
Bien que l'orientation de Schiele ait été conditionnée par des
circonstances personnelles, ses allégories n'ont jamais été
explicitement autobiographiques.
À première vue, le trio représenté dans Mère avec deux enfants semble constituer une rupture avec les duos qui habitent la plupart des
allégories de Schiele. Cependant, ce sont toujours les deux enfants qui
portent le poids de l'image.
message. Ce sont, après tout, un assemblant prototypique de
Schiele, représentant deux réponses antithétiques et pourtant
complémentaires à la vie : celle sur la gauche passive, endormi, sans
vue ; l'autre actif, éveillé, un « voyant ». La mère, par
comparaison, s'estompe en arrière-plan. Elle n'est peut-être pas
morte, mais elle est épuisée. Ayant déjà accompli sa fonction la plus
importante, elle ne survit que pour nourrir passivement la vie qu'elle a
créée."
Une première approche consiste à remarquer le caractère voyeuriste des
tableaux et dessins de l’artiste. Une grande majorité de son travail,
constitué essentiellement de nus, vise à exhiber les corps de telle
manière que ceux-ci en deviennent impudique. Nous sommes très loin de la
représentation de nus classiques, où la beauté des corps tentent
d’approcher le divin et de ce que Winckelman nomme de « noble simplicité et calme grandeur ».
Ici les corps, tout aussi recomposés, s’exposent et n’en cache pas
l’aspect pervers, terme que l’on accole souvent à l’œuvre d’Egon
Schiele.
Couple d'amants 1917.
"La dernière période d’Egon Schiele est marquée par le thème du couple hétérosexuel, de la famille et de la mère. Ces thèmes sont totalement acceptés par la société. Ce dernière phase correspond au moment où Schiele épouse Edith, et
commence à être reconnu internationalement. Cette partie de sa création
est souvent vu comme la moins tourmenté. Il peint des tableaux qui
correspondent plus à un idéal bourgeois, et arrive à les vendre plus
facilement. De nombreuses expositions sont organisées autour de ses
œuvres dans le reste de l’Europe. On a souvent analysé le choix d’Egon
Schiele d’épouser Edith,
comme un abandon de Schiele à la morale bourgeoise dans laquelle il a
été élevé. On peut voir dans ses œuvres, moins provocantes, ce même
abandon. Cependant même si le sujet est moins érotique il reste le
miroir des interrogations de Schiele."
La visite du musée Leopold se termine, épuisant, extraordinaire, incontournable. Petite collation avec un plat du jour de bonne cuisine asiatique sur la terrasse du café Leopold avant de continuer vers Grinzing avec un auparavant, visite de quelques sites architecturaux modernes.
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