mardi 17 octobre 2023

VIENNE, AUTRICHE, LE CIMETIÈRE CENTRAL, ZENTRALFRIEDHOF


 En quittant le Belvédère, nous allons manger une patisserie près de l'Opéra. La  pâtisserie Gerstner occupe en effet une partie du palais Todesco, et notamment les salles de l’étage noble, ou bel étage, dont les fenêtres donnent sur l’opéra. C'est Nicole, notre greeter qui nous a conseillé d'aller là plutôt que chez Demel. La patisserie se trouve dans le palais Todesco qui fut construit entre 1861 et 1864 dans le style historiciste.

Il se composait alors de 500 pièces.  Sa grande façade, sur le Kärtner Straßes est remarquable par ses pilastres avec des  chapiteaux très ornés et par de nombreuses figures humaines. Le long balcon et les autres parties en saillies de l’étage noble sont ainsi soutenues par atlantes masculins et tout en haut de la façade, des figurines féminines soutiennent en grand nombre la corniche et la balustrade. Nous prenons un thé et un délicieux apfelstrudel avant d'aller récupérer nos places pour le ballet Don Quixotte version Rudolf Noureev que nous verrons samedi soir. Les places que j'ai retenues sont surclassées et nous occuperons la loge qui domine l'orchestre et le coin gauche de la scène. Nous prenons le tram 71 jusqu'au cimetière central, le Zentralfriedhof. C'est là que le film le Troisième Homme commence et finit. C'est un cimetière immense qui couvre 250 hectares.

A l'époque de sa création, le peuple autrichien était plus tolérant que dans les années après la chute de l'empire. Ici coexistent les tombes catholiques majoritaires  avec des tombes r orthodoxes (princesses russes , juive, bouddhiste (Stillness Park), islamique et protestantes.Le bâtiment de l'entrée est de style Art Nouveau. Le personnel qui vend les billets est très désagréables, un mot à peine, pas un sourire, les touristes les emmerdent qui viennent visiter des morts qui leurs sont étrangers. 


Autre beau monument au hasard des allées, cette dame blanche voilée dans un écrin de verdure. Plus étonnante, cette tombe, un homme estropié et décapité , je crois, et sur la stèle, le corps nu d'une femme désirable (Barbara) qui fait l'amour avec un squelette C'est  en fait la tombe de Alfred und Barbara Hrdlicka. Alfred  sculpteur et dessinateur fut l'un des artistes européens les plus engagés contre le fascisme.

La tombe d’Alfred Hrdlicka (avec son épouse Barbara) au Zentral-friedhof comporte deux sculptures en bronze qui disent parfaitement les deux versants de son art : un corps d’homme se tord, dans un dernier sursaut peut-être, avec le poing gauche qui reste levé, et au-dessus de lui, un corps de femme nue s’unit à la mort. « Ich bin ein pornographischer Mensch, alle Kunst geht vom Fleisch aus »"Je suis un pornographe , tout art vient de la chair": une chair qui au-delà de sa dégradation continue à animer le papier et la toile, à insuffler vie à la pierre.  


Tombe de Carl Ritter von Ghega. Elle est située près de celle de Beethoven et celle de Schubert.
Carl Ritter von Ghega (Venise, 10 janvier 1802 – Vienne, 14 mars 1860), ingénieur. Né à Venise dans une famille d’origine albanaise, il étudia le génie, l’architecture et les mathématiques à l’université de Padoue, où il obtint son doctorat à dix-huit ans. Il commença sa carrière dans le génie civile à Venise et travailla à la construction de la route reliant Cortina d’Ampezzo à Tolbach (1833). De 1836 à 1840, il supervisa la construction de la voie ferrée de Brno à Břeclav et étudia les voies ferrées d’Europe et d’Angleterre. En 1842, il fut nommé directeur de la commission chargée d’élaborer le réseau ferroviaire de l’État. Il fit un voyage d’études aux Etats-Unis (1842) et à son retour fut chargé de faire les plans pour une voie ferrée allant au sud et reliant Gloggnitz par Mürzzuschlag et Graz à Trieste. La traversée du massif du Semmering était alors jugée impossible. Il soumit en 1844 un projet pour la traversée du Semmering et supervisa la construction de puissantes locomotives. La construction de cette voie, commencée en 1848, fut complétée avec succès en 1854 en même temps que son plan d’un réseau ferroviaire pour tout le royaume de Habsbourg. Dès 1851, en reconnaissance de ses travaux, l’empereur lui conféra le titre de chevalier (Ritter).

 Johann Nepomuk Prix. C'est un politicien, maire de Vienne dans les années 1830 , sa tombe est donc arrogante et pompeuse mais sa trace dans l'histoire de l'empire est plus modeste.

Voilà une autre tombe monumentale mais les personnages qui y ont élu domicile, ne semblent pas passés à la postérité. J'aime bien le cortège funéraire qui accompagne le défunt et qui me rappelle une superbe tombe au cimetière San Fernando de Séville, celle de Joselito, le célèbre matador de toros.

La suivante n'est pas mal non plus. Le défunt accueille à l’entrée de sa belle demeure, les femmes pleurent sur le parvis, et 2 Sphinx gardent l'accès.

Dans la famille Strauss, Johann, le père ou l'ancien joue du triangle. C'est le premier musicien de la famille. Il est universellement connu pour ses valses, qu'il contribue à populariser, établissant ainsi les bases qui permettront à ses fils Johann II, Josef et Eduard I de poursuivre la dynastie musicale. Son œuvre la plus célèbre est "La Marche de Radetzky", jouée imperturbablement chaque année par l'orchestre philharmonique de Vienne lors du traditionnel Concert du nouvel an. 

Fils de Johann Strauss I, frère de Johann Strauss II et d'Eduard Strauss, il travaille d'abord comme ingénieur et concepteur avant de rejoindre l'orchestre familial vers 1850.
Son père le destine à une carrière dans l'armée autrichienne. Ses études ne le préparent pas à une carrière de compositeur. Il devient même architecte auprès du Conseil Municipal de Vienne et présente, en 1853, un projet de véhicule de nettoyage de rue. La même année, son frère aîné Johann tombe gravement malade, Josef le remplace. Il épouse Caroline Pruckmayer, à Vienne, le 8 juin 1857 et leur fille, Karoline Anna, nait en 1857. De santé fragile, il s'évanouit en dirigeant son 'pot-pourri musical' lors de sa tournée en Pologne, et meurt peu après à Vienne.
Il a composé beaucoup de valses célèbres du répertoire classique dont "Sphären-Klänge" ; (musique des sphères), "Delirien" ; (délires), "Transaktionen" ; (transactions), "Mein Lebenslauf ist Lieb' und Lust" ; (mon curriculum vitæ est amour et joie) et "Dorfschwalben aus Österreich" ; (hirondelles des villages d'Autriche), polkas (dont la plus célèbre est est la "Pizzicato Polka" composée avec son frère Johann II).

Pour que tous ces morts passent leur mort en vacances coquines, une beauté se fait bronzer toute nue . Si c'est une tombe, elle donne envie de ne pas s'y reposer.

La tombe d'Hugo Wolf, compositeur. Connais pas. "Hugo Wolf est un des grands maîtres du lied. Il compose plus de trois cents chants dans la grande tradition de Schubert et Schumann. Sa musique, influencée par Wagner, marque toute une génération : Gustav Malher et l'Ecole de Vienne pourront alors entraîner le genre du lied vers d’autres voies nouvelles. Considéré comme un compositeur secondaire par ses pairs et de nombreux musicologues, il faut aujourd’hui lui rendre sa véritable place dans l’histoire de la musique occidentale :  la première.Ernst Decsey

C'est le 22 juin 1888 que Beethoven et Schubert ont rejoint leurs tombes, dans le 'quartier' des musiciens décédés, qui avaient été regroupées au Zentralfriedhof, au sud de la capitale..."la tombe de Ludwig van Beethoven parfaitement entretenue, obélisque dans lequel est incrustée une lyre d’or, semble veiller sans fausse note sur l’harmonie des lieux. En un tel endroit, ce n’est pourtant pas de silence dont on aurait envie, mais plutôt de musique. Celle qui semble s’échapper des sépultures de la section n° 32: Christoph Gluck, Joseph Strauss, Johann Strauss, Arnold Schönberg… Un monument funéraire a même été élevé à la mémoire de Mozart, dont le corps fut jeté dans une fausse commune au cimetière viennois de Saint-Marx et jamais retrouvé."

Le cénotaphe de Wolfgang Amadeus, se trouve au centre de ce cénacle de grands compositeurs veillé par une gente dame.  Tout près de lui, un élève de Salieri, Franz Schubert.

  "Il commence à composer, malgré les réticences de son père, qui lui interdit même de rentrer à la maison, alors que sa mère est en train de mourir (1811-1813). Schubert écrit d'abord pour le piano (dès 1810), puis pas moins de huit quatuors à cordes, quelques ouvertures et des lieder. En 1812, il devient l'élève  de Salieri, pour lequel il gardera de l'estime jusqu'à sa mort. En 1813, fortement influencé par Haydn, Mozart, et surtout par Ludwig van Beethoven, il compose sa première symphonie. Quelques années plus tard, Schubert, qui à seulement 17 ans, a déjà composé un opéra , une messe , et son premier chef-d'oeuvre dans le domaine du lied. Quand il meurt à 31 ans, il a déjà composé  plus de 1000 oeuvres, dont 600 lieder sur des textes des plus grands poètes de la langue allemande (Klopstock, Goethe, Schiller, Rückert, Heine), de ses amis (Mayrhofer, Körner, Spaun, Schober, Senn, Collin, Schwind).  Schubert a écrit pour tous les genres musicaux, excepté le concerto.  Il ne fut pas reconnu de son vivant, de nombreuses oeuvres n'ayant été jouées pour la première fois que bien après sa mort.

 La tombe de Johann Strauss II, Ses valses font le tour du monde. Sang viennois, La Valse de l'empereur, Le Beau Danube bleu, Aimer boire et chanter, Légendes de la forêt viennoise, sont autant de chefs-d’œuvre aériens et resteront pour les Viennois une image de gaieté et de verve. La tombe est très exubérante. Nous traversons le carré où sont enterrés les président autrichiens. Kurt Waldheim est en bonne place mais peut on reprocher  à l'Autriche de l'avoir choisi pour président après que les Nations Unis l'avait choisi comme Secrétaire Général. 

Nous nous dirigeons vers l’Église Saint Charles Boromée.

Le concours d'adjudication est gagné par Max Hegele âgé de 27 ans seulement, un élève de Otto Wagner. Dans le plan de Hegele, il y a l'ensemble des bâtiments importants dont le portail de pylône (1905) avec les halls funéraires des deux côtés et l'église avec les caveaux à colonnes qui l'entourent, mais il faut attendre un bon moment avant que la construction de l'église  commence. La première pierre est solennellement posée le 11 mai 1908 et, après
trois années seulement, l'église est consacrée et inaugurée le 14 juin 1911.
Le plan est dessiné d'après la forme d'une croix grecque dominée par le dôme central d'une hauteur de 40 m environ. Les quatre branches courtes de la croix sont couvertes par des voûtes de forme semi-circulaire avec des dalles en coffrets au-dessus desquelles se trouvent des galeries, soutenues par des colonnes immenses, dans le nord, l'ouest et l'est. La quatrième voûte, vis-à-vis de l'entrée centrale, est la niche de l'autel. Le bâtiment, qui est stylistiquement proche de l'église Otto Wagner à Am Steinhof, est l'un des monuments Art Nouveau les plus importants d'Autriche. Dans cette église se trouve le tombeau du  maire populiste de Vienne, le Dr. Karl Lueger . L'église est Jugendstil mais comporte des éléments d'architecture égyptienne.

La décoration intérieure, art nouveau, a été réalisée par de nombreux artistes et est quasiment intégralement d'origine (ne manque que les cloches et des vitraux du côté ouest, respectivement fondues et perdus durant la Seconde Guerre mondiale, dont les bombardements abîmèrent aussi la toiture). L'intérieur est un espace haut, clair, serein; à travers les fenêtres et les vitraux de mosaïques créées par Leopold Forstner entre une belle lumière extraordinaire. Forstner créa aussi les mosaïques magnifiques des quatre évangélistes. L'intérieur fut peint à l'aide de pochoirs, une technique où chaque couleur a son propre pochoir. Particulièrement belles sont les lampes en laiton avec des baguettes en verre et les chandeliers somptueux dont la lueur est reflétée par les mosaïques des croix d'apôtres de l'atelier Ignaz Dürr. Le zénith du bâtiment dans le sens propre et figuré du mot est sans aucun doute la coupole centrale, un chef-d'œuvre créé à l'origine également par Ignaz Dürr. Environ 21.000 pièces de mosaïques forment une couronne de rayons sur un fond bleu avec exactement 999 étoiles. 

 

Pour qui fait du nécro-tourisme, je rappelle quelques cimétières superbes pour l'art funéraire qui y fut appliqué.

Le cimetière San Fernando à Séville avec des tombes remarquables de toreros andalous et de flamcncera. 

 https://www.lemounard.com/2010/01/seville-et-carmona.html


Le cimetière Staglieno à Gènes:

https://www.lemounard.com/2014/09/dernier-jour-genes-le-cimetiere-di.html

Le Père Lachaize à Paris:

 https://www.lemounard.com/2017/03/ballade-au-pere-lachaize-premiere-partie.html  et:

https://www.lemounard.com/2017/03/promenons-nous-au-pere-lachaise-suite.html

 Le cimetière Kerepesi à Budapest:

https://www.lemounard.com/2017/02/budapest-le-cimetiere-kerepesi.html

Pour rappel, un repas à oublier chez Steirereck où nous allons ce soir:  

https://www.lemounard.com/2023/09/vienne-steirereck-deux-etoiles-une.html




 

 

 

 

 

 

 


 

 




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